C'est entendu.
Affichage des articles dont le libellé est street cred. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est street cred. Afficher tous les articles

lundi 5 avril 2010

[Vise un peu] Strong Arm Steady & Madlib - In Search of Stoney Jackson

J'en rêvais depuis des années et ils l'ont fait : "In Search of Stoney Jackson" est mon idéal en terme de hip hop et il compte aussi parmi les projets de Madlib que je préfère. Ça n'était pas vraiment parti pour être le projet le plus enthousiasmant du moment. L'affectation de Madlib à la production ne suffisait pas à faire oublier la profonde nullité du premier album de Strong Arm Steady, mais un coup d'œil à la liste des invités annoncés pouvait laisser espérer un net mieux : Fashawn, Oh No et Guilty Simpson d'un côte, Talib Kweli et Phonte de l'autre, il y avait de quoi faire.

Strong Arm Steady est aujourd'hui un trio (Mitchy Slick, Phil Da Agony et Krondon) rescapé de ce qui fut un collectif californien, auparavant centré autour de Xzibit, le type qui présentait les types qui pimpaient les bagnoles d'autres types (peut-être le font-ils toujours d'ailleurs mais ça n'est pas le sujet), et en en réalité, le seul fait que le combo soit basé à LA me faisait présager le pire tant il est vrai et plutôt triste qu'aucun groupe estampillé West Coast ne m'avait jamais accroché. Trop commercial ou trop pimp, trop gangsta ou trop macho, je n'y trouvais jamais mon compte et devais me rabattre sur les productions East Coast du moment, un brin passéistes et pas forcément très enthousiasmantes, même à leur meilleur (Damu, Elevated Ruffians...). Et pourtant "In Search of Stoney Jackson" est devenu mon album de rap post-1993 favori.


(Chittlins & Pepsi)

Il y aura certainement matière débat autour de la qualité intrinsèque de cet album et il y a d'ailleurs un consensus chez tous ceux à qui j'ai parlé de ce disque : "c'est certes pas mal du tout, mon vieux, mais de là à parler d'album hip hop préféré, tu exagères." Et pourtant.

La formule n'est absolument pas révolutionnaire, mais elle est efficace et regroupe absolument TOUS les éléments qui selon moi font de bons morceaux hip hop, à commencer par de bonnes basses et de bons beats. Ces derniers contribuent à dynamiser et à faire groover (Questions, Cheeba Cheeba) mais ne sont pas forcément omniprésents et laissent respirer les samples de bon goût, pas trop martelés, d'origines suffisamment variées (du dub au rock progressif affreux de Starcastle) pour éviter le cliché du manque de culture musicale (écoutez "Critical Beatdown" des Ultramagnetic MC's, ces vieux types qui n'avaient que des disques de James Brown et des JB's chez eux au moment de choisir des samples, et vous comprendrez).

Évidemment la production de Madlib n'est pas pour rien dans ce pouce levé. On pourrait lui reprocher des beats pas toujours très catchy mais il faut bien saisir que l'on n'est pas chez Madvillain et que ça n'est pas un album de Madlib. Le boulot de ce dernier est impeccable justement parce qu'il se met au service d'un projet sans lui faire de l'ombre : sa production est sobre, très rétro, et aux antipodes de ce que le West Coast est habituellement (pensez à l'aspect putassier et vulgaire de tous les 2Pac, Ice Cube ou Dr Dre...). C'est avec subtilité que son talent fait son affaire, en intercalant d'ingénieux interludes (le bruyant Telegram, le très inattendu Interlude 2, désarmant après un sample funky), en faisant de la bien-nommée Needle in the Haystack un géant mindfuck sonore (doté du meilleur beat du LP) ou en glissant certaines de ses meilleures idées dans les-dits interludes, laissant le champ-libre aux MC's qui peuplent les nombreux tubes en puissance de l'album.

Sans aucun raté (même si certains pourront trouver le refrain de New Love d'un goût douteux), chaque piste vogue sur un groove façon East Coast ni trop classique ni trop cérébral, boosté en énergie (sexuelle) et délivré par une armée de MC's inspirés. Bourré de samples soul et funk, "In Search of Stoney Jackson" empreinte à ces genres leurs phéromones et l'on a parfois l'impression qu'il serait la parfaite bande son d'un film de blaxploitation mis au goût du jour. L'analogie ne s'arrête d'ailleurs pas là puisque, comme d'innombrables labels soul le firent, et comme Daptone continue à le faire, Strong Arm Steady semble jouer le rôle de l'artiste entouré le temps d'un album par le "groupe du label." Madlib, son petit frère Oh No, ou encore Guilty Simpson, c'est toute une famille Stones Throw qui épaule le trio californien, lequel ne se prive pas de citer à tour de bras chacun des mentors, modèles et ainés qui ont compté : A tribe Called Quest, De la Soul, Raekwon, LL Cool J et les autres sont passés en revue et honorés. Plutôt que de s'attarder sur des histoires de drogue, de cul ou de bagnoles flambant neuves, le propos tourne autour du quotidien américain de ces rappeurs qui n'ont pas les moyens de frimer autant que P. Diddy, et qui sont davantage concernés par la guerre en Irak, la crise financière, ou leurs relations aux femmes ("That's why I got you pregnant, coz your pussy is fertile," in Chittlins & Pepsi) et qui en parlent avec le plus souvent une dose d'humour noir et de réalisme franchement rafraichissant, sans se dépareiller de ces valeurs familiales qui leur tiennent à cœur ("The love for my family's priceless/(As) long as I got them we'll be able to fight this/Coz nigger I'm black, i was born in a financial crisis shit," in Best of Times).


(Best of Times)

Strong Arm Steady, en tant que trio californien, n'est probablement pas ce qui se fait de mieux en matière de hip hop en 2010, certes non. Mais imaginé comme le centre d'un collectif de MC's (une bonne quinzaine de rappeurs officient sur cet album) cadré par un producteur aussi inspiré que Madlib, ils forment l'un des seuls super-groupes à avoir réussi l'exploit d'éviter de se planter tout en parvenant à emporter le gros lot. Quant au fameux Stoney Jackson, acteur de seconde zone des années 80, il n'aura servi qu'à offrir sa silhouette à la superbe pochette de ce véritable chef d'œuvre mineur totalement indispensable.


Joe Gonzalez






P.S. : "In Search of Stoney Jackson" n'est que le premier des deux albums annoncés par Strong Arm Steady pour 2010. "Arms & Hammers" prévu depuis 2008 mais repoussé pour des raisons juridiques n'a pas encore de date de sortie. De plus, Stones Throw Records vient de publier la version instrumentale de "Stoney Jackson," que vous pouvez vous procurer ici.

dimanche 21 mars 2010

[Gueule de bois] K-Def - Hey Funkbox

Le nom de K-Def ne vous dit sûrement rien, et c'est normal. Il était l'un de ces artisans de l'ombre de l'age d'or du hip hop East Coast dont les productions ont orné des disques bien moins anonymes que son blaze. A l'occasion vous pouvez jeter une oreille sur les deux premiers albums des Lords of the Underground pour vous en convaincre car ils n'ont pas volé leurs statuts de classiques du hardcore hip hop au début des années 90.

Après une période creuse depuis la fin des 90's, K-Def a discrètement fait son retour à la production en 2004 avant de publier deux volumes d'une compilation d'instrumentaux "from the 90's" dont est issu le morceau ci-dessous. Un titre qui en dit long sur les intentions de K-Def, prêt à nous ramener en arrière le temps d'une compilation qui, si elle use des ficelles classiques des sons de l'époque, n'en est pas moins tout à fait authentique. On retrouve avec plaisir les raisons qui nous avaient fait aimer cette musique à l'époque : une grosse basse, un sample de funk qu'on ne connaît pas, une découpe géniale et de la grosse cadence qui fait hocher la tête.

Bien entendu, ca n'a rien de révolutionnaire, et ca n'apporte pas grand chose au genre pour reprendre un discours typique de rock critic. Mais ca ne m'empêche pas de prendre un pied monstrueux à écouter Hey Funkbox en boucle et à m'interroger quant au rappeur qui irait le mieux sur ce son là. Parce que c'est juste l'essence même du hip hop tel qu'il était quand j'en suis tombé amoureux, et que je suis convaincu que ca sonnera toujours aussi bien dans 20 ans.


Thomas.

samedi 20 mars 2010

[Grasse Mat'] Flying Lotus - Camel


Bonjour à tous! En 2008, Flying Lotus (Steven Ellison pour les intimes, producteur/DJ originaire de LA) sortait son second album, "Los Angeles," chez Warp et l'accueil chaleureux qu'il reçut fut, on peut le dire, tout à fait mérité.
Si l'on voulait caractériser rapidement le travail du lotus volant, il faudrait parler de hip hop instrumental planant hautement expérimental et c'est comme de juste une description qui sied relativement bien au morceau de ce matin...

Camel se construit sur une structure plus ou moins simple et s'étage sur différents niveaux d'arrangements soignés. Autour de l'incontournable beat, les samples s'accumulent, tout d'abord une boucle de ce qui semble être un court drone vocal, rejoint par une percussion inquiétante avec laquelle Ellison entretient un suspens certain. L'auditeur contemple l'inconnu, et soudain tout semble enfin s'expliquer. Les notes percent l'épais brouillard et l'on débouche sur quelque chose de plus concret. Cependant, on ne saurait dire si cette découverte est agréable ou non. Le son utilisé et le volume au mixage offrent à ce nouvel élément une importance cruciale en plus de prolonger un doute substantiel. Mais l'éclaircie est brève, et avec la même facilité qu'il peut nous faire sortir de la brume, Flying Lotus nous y replonge.
Comme souvent dans ce type de composition, l'impression d'être enveloppé est largement soutenue par la répétition structurelle. Une seconde phase d'éclaircie est alors amenée, introduite par un break judicieux (qui me fait penser à la voix de Martin Luther King, oui, allez savoir), et qui fait replonger de plus belle dans cet univers incertain.




L'auditeur refait lentement surface, et réalise enfin le pouvoir d'envoûtement que le morceau est capable de déployer. La dualité de Camel semble alors plutôt bien illustrer une certaine vision de la Ville (Los Angeles en l'occurrence), avec ses aspects d'immense tissu urbain, saturé, étendu à perte de vue. Fameux.


Hugo

vendredi 19 mars 2010

[Vise Un Peu] Madlib - Medicine Show Vol. 1-3

L'année 2010 a vu Madlib lancer et concrétiser un projet dont la folie est à la hauteur de son talent : sortir un album par mois sous l'appellation Madlib Medicine Show. Aucun doute que le médicament en question est plutôt vert connaissant le bonhomme, mais il est plus intéressant de noter la logique de ces publications dont les volumes aux nombres pairs sont des mixtapes de toutes sortes de musiques du monde - au sens large du terme - et les autres volumes des recueils de productions originales de Madlib. Autant dire qu'on reparlera encore de son travail dans les mois à venir sur C'est Entendu tant le calendrier que s'est fixé le natif d'Oxnard est chargé.





Madlib Medicine Show No. 1: Before The Verdict

Annoncé comme un prélude à la collaboration annoncée de Madlib et Guilty Simpson sous le nom d'OJ Simpson (les initiales de Madlib étant OJ), ce volume se compose en majorité de remixes de titres de "Ode to the Ghetto," le précédent album de Guilty Simpson. Ceci dit, remixes ou pas, il n'y a aucun doute que Madlib a pris soin de ciseler des beats en adéquation avec les rimes de son nouveau protégé. Ce sont encore une fois les petits détails qui font la différence : des coupures au moment où Guilty finit son couplet, le rythme en parfaite adéquation avec le flow ou encore des samples vocaux calés pendant les respirations. Bref, difficile de le prendre en défaut sur sa compréhension du sujet tant elle est solide.

Il n'en reste pas moins que malgré ses nombreuses qualités qui feront replonger les Madlib addicts comme moi avec grand plaisir, "Before the Verdict" n'a pas la cohérence ni la finition d'un vrai album. Le disque se disperse typiquement au gré des idées de son producteur, souvent coupable de se laisser aller à vagabonder plusieurs minutes en roues libres ou encore à s'autoriser quelques redites (Life Goes By étant une version alternative du America's Most Blunted de Madvillain). Heureusement, l'aspect peu dégrossi de l'œuvre ne nuit pas outre mesure à son appréciation, même si ce flou artistique rend ce Medicine Show plus difficile à appréhender, notamment d'une seule traite.



Lucky Guy







Madlib Medicine Show No. 2: Flight to Brazil

On le sait habitué à explorer des piles de vinyles entières à la recherche de nouveau matériel à séquencer, mais aussi à le partager à travers des sélections et en cela les volumes pairs du Medicine Show ne sont que la continuité de son travail. En effet, il nous avait déjà gratifié par le passé d'une exploration du catalogue Trojan ("Blunted in the Bomb Shelter") en ce qui concerne le reggae ou d'un volume de "Dirty Brasilian Crates" au titre assez explicite. "Flight to Brazil" s'inscrit clairement dans la lignée de ce dernier, et franchement, l'intérêt que l'on peut porter à ce volume est directement proportionnel à l'intérêt qu'on porte à Madlib et surtout à la musique brésilienne. Étant amateur mais n'ayant que de vagues connaissances en la matière, j'ai trouvé le voyage appréciable et dynamique. Il faut dire qu'il ne s'éternise que rarement sur un titre donné et que sa sélection d'oldies est en général classieuse. Ce "Flight To Brazil" n'est certainement pas à conseiller à tout le monde, mais la curiosité de ceux qui y jetteront une oreille avec l'esprit ouvert sera récompensée.


Madlib Medicine Show No. 3 : Beat Konducta in Africa

Qui dit Beat Konducta dit hip hop instrumental, en tout cas c'est en général la règle en ce qui concerne cet alias (parmi tant d'autres) d'Otis Jackson. Cette fois-ci, pas de redites ou de reprises de samples déjà entendus, puisque Madlib nous offre 43 pistes originales, plutôt courtes donc, sans rap et sans besoin d'adapter ses idées aux besoins d'une chanson. C'est un format qui lui est particulièrement adapté et dans lequel il excelle : une structure minimale et des beats sous la forme d'idées brutes exposées en 2 minutes maximum, un peu comme une réserve naturelle de beats dans leur plus simple appareil. L'avantage c'est qu'on a rarement l'occasion d'être ennuyé dans un si court laps de temps, et que les meilleurs titres donnent forcement envie de réécouter au moins une partie du disque.

Outre ces considérations de formats, on remarque sans surprise que les samples africains sur lesquels s'appuie Madlib lui vont particulièrement bien. Après tout en terme de qualité l'Afrique n'a pas grand chose à envier à n'importe quel continent, et la plupart des gens qui aiment ces musiques le savaient bien avant que cela ne devienne à la mode récemment. Et ce n'est pas le premier à se lancer dans cette exercice de style puisque Oh No (son petit frère) a récemment sorti son "Dr. No's Ethiopium" puisant dans le patrimoine discographique de la patrie de Mahmoud Ahmed et de Mulatu Astatke.

Par ailleurs on sent aussi que le sujet a franchement inspiré Otis et on ne compte plus les moments de grâce dans ce joyeux bordel. Généralement on les remarque juste avant d'être aussitôt sevré de cette satisfaction musicale pour se voir présenter un autre sample, qui finalement le temps que l'oreille s'y accoutume, s'avère tout aussi bon que le précédent. Autant dire qu'assez vite on ne sait plus où donner de la tête et qu'il faut plusieurs écoutes pour ne pas changer d'avis toutes les 5 minutes ("Ah c'est celle là la meilleure ! Ah non c'est celle-ci !"). Mais c'est bien la preuve de la réussite de ce "Beat Konducta in Africa" qui, bien qu'encore plus brut et foutraque que "Before the Verdict", se paie le luxe d'être meilleur.



Jungle Soundz (Part One)







Thomas.

[Réveille Matin] Madvillain - ALL CAPS

Bonjour à tous ! Ce matin et dans les quelques jours à venir, C'est Entendu continue le who's who du hip hop contemporain et il est grand temps de vous parler de Madlib, ce DJ, producteur et MC américain (dans l'ordre d'importance) qui après avoir participé à certains des albums du genre les plus acclamés de la dernière décennie, décide d'aborder tranquillement 2010, par exemple en ayant déjà à son actif cette année par moins de quatre albums. Vous avez bien lu : en moins de trois mois le type a sorti autant d'albums que Portishead en seize ans. Mais ce n'est pas tout hein, si tout se passe bien, il devrait encore en sortir onze autres avant la fin de l'année. Mais je laisse à Joe et Thomas le soin de vous en dire plus ce weekend sur l'actualité foisonnante du bonhomme et quant à moi je m'occupe de vous réveiller en causant de Madvillain, ce duo de héros que Madlib (instrus enfumées) forme avec MF DOOM (masque de fer et flow endolori) et qui en 2004 a offert au monde "Madvillainy," chef d'œuvre foisonnant "écrit de sang froid avec un cure-dents" (?) comme l'indique le livret intérieur.




(Madvillain - ALL CAPS)

Des références perpétuelles à la pop culture la plus impénétrable, tendance comics et série-B fauchée (ce qui amène souvent à des collages hilarants de répliques sur-excitées et de vieux programmes radios un peu allumés), des moments de bravoure de non-sens que mâchonne avec nonchalance la grosse voix molle de DOOM, et surtout des instrumentations hautement improbables qui se permettent de passer de Frank Zappa aux Temptations en passant par les B.O. des films de Russ Meyer : tout dans "Madvillainy" dégage une étrange aura de cool, une ambiance tordue qui le rend à la fois incompréhensible et immédiat. Si l'album entier semble aller n'importe où, il faut bien avouer qu'il touche sa cible à tous les coups, si bien que l'on se surprend à se repérer très vite dans ce dédale bordélique débordant d'idées. Réussir à faire accepter sans problèmes ses parti-pris les plus tordus, c'est un peu la marque des grands albums, non ? En guise d'exemple, le tube inattendu ALL CAPS, c'est MF DOOM qui nous explique pourquoi son nom doit s'écrire en majuscules dans une ambiance pop art délicieuse.


Thelonius.

jeudi 18 mars 2010

[Réveille Matin] Robert Johnson - Sweet Home Chicago

En cette semaine labellisée « Street Cred », voici une chanson racontant Chicago en 1936, à l’époque où le blues débarquait en ville mais bien avant l’arrivée de Michael Jordan et des skycrapers (on ne peut pas tout avoir). Bien sûr, pour un type venu du Mississippi, ça devait quand même avoir une sacrée gueule.


Tous le monde a déjà vu cette image et croisé ce nom mythique : Robert Johnson. Ceux qui l’ont écouté sont un peu moins nombreux. En cette semaine où tout C’est Entendu descend dans la rue poser son barbecue, il est temps de rattraper cette tare. Épargnons nous les poncifs sur Johnson : comment il est né, comment il est mort, comment sa légende est trop cool. Je suis sûr que Wikipédia le fait très bien.

La première écoute peut être douloureuse tant Johnson semble être, en plus de son statut de bluesman cultissime, un pionnier du lo-fi avant l’heure mais je vous jure que cette chanson mérite de forcer la porte de vos oreilles en ce jeudi matin. Ce n’est pas tellement l’originalité de la composition qui est remarquable dans Sweet Home Chicago - le thème et une partie des paroles sont d’ailleurs empruntés à un morceau plus ancien attribué à Scrapper Blackwell, Kokomo Blues. Ce qui me touche surtout c’est l’utilisation de la guitare sur laquelle se pose la voix hantée de Robert, avec ce rythme implacable sur les cordes graves contrebalancé par des phrases précises et subtiles en aigu. Ne serait-ce que pour les arpèges d’intro et de fin et ces appels "back to the land of California to my sweet home, Chicago," cette chanson a définitivement quelque chose qui la distingue des milliers d’autres scores en 12 mesures qui peuplent la musique populaire américaine.
Enfin soyons honnêtes, à la longue la confrontation avec les "Complete Recordings" du guitariste américain (soit 19 morceaux dont certains dans plusieurs versions) peut être légèrement lassante et répétitive.

Je vous laisse avec le morceau en question, 3.02 minutes de totale intégrité blues. Enjoy !


Arthur

mercredi 17 mars 2010

[Vise Un Peu] Gorillaz - Plastic Beach

Pfff. Il y a tellement de choses qui ne vont pas avec cet album que l'on ne sait par où commencer, qu'il faut faire attention de ne rien laisser de côté lorsqu'il s'agit de faire la triste liste des erreurs. Au préalable, rappelons les faits brièvement : Damon Albarn, ce héros, avait débuté le projet Gorillaz en 1998 avec le dessinateur Jamie Hewlett en charge du look de ce groupe imaginaire. Profitant de la mise en sourdine de Blur, ils avaient sorti à l'orée du millénaire un premier essai curieux, mystérieux, mais d'une efficacité redoutable, mêlant dub, hip-hop et rock et sur lequel on trouvait des tubes interplanétaires auxquels des clips brillants ajoutaient un pouvoir d'hypnotisme supplémentaire. 4 ans plus tard, doublé avec "Demon Days", sorte de monument de musique populaire moderne fatigué où des synthés régressifs croisaient avec un naturel désarmant des violons et chœurs gospels. A la clé, encore des singles cultes, des séries de concerts acclamés qui consacraient définitivement Gorillaz en tant que projet musical aussi passionnant que grand public. D'une certaine façon, Gorillaz élevait le niveau de la pop, avec des tubes qu'on pourrait presque qualifier d'alternatifs. Il faut bien voir que c'était pour Albarn une espèce de grande machine à faire de la pop avec invités dans laquelle il mettait ses influences variées, les imbriquait avec plus ou moins de désinvolture pour en faire quelque chose d'autre qui gardait de la cohérence. Si aujourd'hui nous subissons ce "Plastic Beach," ce n'est pas parce que la machine est cassée. Non, la pop est là, et c'est comme l'a dit Damon la chose "la plus pop qu'il ait jamais faite." Le problème, c'est surtout qu'il a accumulé beaucoup de choses très laides lorsqu'il a produit ses chansons, toutes plus ratées les unes que les autres, mélanges mal fichus et sans cohérence d'ambiances vulgaires, et tout ce qui fonctionnait auparavant semble avoir décidé d'échouer.

Premier constat alarmant : "quid des tubes?" Quel étrange album vraiment. A l'issue de ces 16 morceaux, aucun ne ressort de manière franche, tout à l'air vague, quelconque, à l'image de Stylo, non-single bizarre à la basse plus agaçante qu'entêtante et où la participation de Bobby Womack est à la limite du supportable, entrecoupé par un Mos Def inutile. C'est à l'image des participations de la quasi-totalité des invités d'ailleurs : c'est terrible de rassembler tant de monde et de si mal les utiliser. Paul Simonon et Mick Jones sur le morceau-titre ? Génial ! Pour faire quoi ? Une ligne de basse simpliste à la fin et quelques notes de guitare qu'ils ont enregistrées en une journée. C'est tout ? Eh bien oui, le reste (des synthés plutôt cool) est ruiné par un final bâclé avec des voix pitchées. Et Mark E. Smith, ça risque d'être fameux sa participation non ? Non, Damon veut simplement un alcoolique pour chaque album maintenant, et c'est donc une tentative pour refaire comme Shaun Ryder sur DARE, sauf qu'il ne fait que beugler deux-trois fois dans le fond d'un instrumental encore moins passionnant que le dernier Daft Punk. Rendez-vous compte, il y a tellement d'invités mal employés partout qu'il faut attendre le quatrième morceau pour enfin entendre Damon chanter sur Rhinestone Eyes, et l'on serait presque prêts à oublier que sa voix fatiguée passée sous pré-ampli fait redite tant on est content de l'entendre enfin. Ça n'empêche pas ses couplets d'être fades ceci dit.

(On Melancholy Hill)

L'autre énorme problème, ce sont les parties hip-hop. Alors qu'on peut encore se souvenir par cœur de la participation de Del Tha Funky Homosapien sur Clint Eastwood, les featurings rap ici sont corrects au mieux (à l'exemple de Mos Def sur le trop long mais un peu cool Sweeptakes, en écoute à gauche) et affligeants au pire comme ce morceau introductif sur lequel un Snoop Dogg erre en pilote automatique sur un vieux beat moisi et ose sortir quand même en guise d'entrée "The Revolution will be televised" (bien vu mec, un vieux trait d'esprit déjà fait 300 fois !). Tout sombre dans la médiocrité, comme ce Superfast Jellyfish qui fait de son mieux pour jouer le jeu d'un peu hip-hop alternatif avec ses samples, ses flows rigolards (De La Soul, vous savez faire mieux que ça) et son refrain pourri qui sonne comme un jingle, mais échoue complètement pour donner 3 minutes de non-sens vaguement chiant.

En se plongeant dans une espèce de délire les-80's-revues-par-les-00's, c'est comme si les morceaux étaient devenus creux pour coller à notre époque où la pop devient de plus en plus pauvre, tout ça pour faire à tout prix du tube FM circa 2010. Soudain, l'incompréhension désagréable qui peut vous envahir à l'écoute de n'importe quelle horreur lobotomisante régurgitée par les radios s'applique à Gorillaz. C'est toujours pop. Juste de la mauvaise pop. Broken sonne comme un essai r'n'b ringard et On Melancholy Hill est complètement à la ramasse avec ces claviers sautillants dont OMD n'auraient pas voulus et surtout ces suites d'accords téléphonées qui n'appellent aucune mélancolie, à part celles du temps où Damon faisait mieux. Il ne semble pas trop savoir où aller ni comment regrouper ses idées : on passe de cordes libanaises à une boite à rythme sans que la transition ne soit pertinente ou réussie. Entendre Empire Ants muter de ballade mignonne en un énième essai de groove 80's sur lequel vocalise une fille lambda, c'est triste. Et c'est là que l'absence d'un producteur comme Danger Mouse se fait cruellement ressentir. "Plastic Beach" est un gros bordel qui ne sait pas où il va et qui y va n'importe comment. Seule espèce de continuité, ce vague thème sur la défense de l'environnement, déjà présent dans "Demon Days." Mais d'une certaine manière, avec ses paroles écologistes qu'accompagnent des synthés plastiques qui mettront sans doute eux aussi un millénaire avant de se désintégrer enfin, "Plastic Beach" est un album très ironique, participant à une espèce de pollution musicale qu'elle dénonce indirectement, un peu comme faire de la prévention environnementale avec un hélicoptère. Tout est figé, bourré de pétrole traité, aussi beau qu'une zone industrielle en proche banlieue. Peut être était-ce le concept ? Il est tenu sur toute la longueur, en effet.

(Some Kind Of Nature avec l'ami Lou)

Oh, tout n'est pas à jeter non plus. Il y a quelques petits éclairs de raison comme le formidable Some Kind Of Nature Lou Reed, venu de nul part, est absolument impérial. Et puis il y a l'épilogue (enfin, le dernier morceau officiel, parce que dans certaines des 5 versions différentes de l'album qui sont sorties, il y a aussi des bonus tracks qui servent principalement à prendre votre argent), Pirate Jet, avec son beat un peu crasseux à la Nightclubbing, son synthé infecté et sa nonchalance cool, consolation un peu dérisoire, où Damon chante, désabusé, "It's all good news now", et fait soudain mouche, en dernier recours, comme si à la fin, il avait pigé comment utiliser tout ce qu'il avait à disposition, montrant que son talent est toujours là, juste gâché, et le tout de s'éteindre doucement dans un long fade out qui laisse place à un silence de mort et l'envie presque physique d'écouter autre chose pour oublier ce grand trop-plein de vide. En fait, ce n'est pas tant que "Plastic Beach" est affreux. C'est surtout un album profondément déplaisant que l'on a pas envie de réécouter.




Emilien.

[Réveille Matin] Suicide - Ghost Rider


Quand on me parle de la rue, de la crasse des caniveaux et du véritable cri qui vient du bitume, je dois dire qu'il me vient tout de suite à l'esprit une image précise : Alan Vega, sur scène, sorte de zombie d'Elvis, tremblant, les yeux grands ouverts, avec peut-être une chaine de vélo à la main, l'air halluciné et terrifié, avec dernière lui un Martin Rev impassible, ses grandes lunettes noires et son blouson en cuir, qui joue sur son vieux farfisa pourri des boucles simplistes et surpuissantes pendant que le public balance ses bouteilles de bières et hurle. Suicide. Duo arty formé en 1971 par un sculpteur et un musicien free-jazz. Un nom de groupe en guise de slogan. Et avant de faire au cours des années 80 une musique électronique lente et parfois émouvante dont on entend encore les échos chez des groupes comme Nite Jewel, ces deux New Yorkais ont sorti un album en 1977 qui réveillerait des morts, qui sent la pauvreté, les squats pourris dans les quartiers chauds de SoHo, une espèce de vieille hargne un peu perdue dans la drogue qui vous étouffe, quelque chose de poignant qui agresse l'auditeur. Le premier album de Suicide est un immense poing dans la figure, et s'il a été ensuite l'album culte qui a inspiré des tas de groupes, il ne faut pas oublier le contexte nettement moins favorable de l'époque. On est en plein milieu des 70's, des rockeurs parfois terriblement insipides font joujou au CBGB's, et voilà ces deux types, punks avant le Punk, qui n'ont pas de guitare, pas de basse, même pas de batterie, juste une vieille boite à rythme d'occasion qui martèle des sons sourds et binaires avec absurdité. Un concert de Suicide, c'était un choc frontal, une immense incompréhension. Leur live culte "23 Minutes Over Brussels" en est l'exemple ultime : en première partie d'Elvis Costello, rien ne leur est épargné : insultes, hurlements, la foule les hue, mais ils s'en foutent, ils continuent, et au début de Frankie Teardrop, descente aux enfers sonique, l'un des morceaux les plus terrifiants jamais mis sur bande, sous les cris du public, Alan Vega hurle de toutes ses forces "SHUT THE FUCK UP! THIS IS ABOUT FRANKIE!" comme si sa foutue vie en dépendait, avant que le son soit coupé et qu'ils soient obligés de sortir de scène sous les "fuck you".
Faisant un espèce de rockabilly électronique complètement tordu et déstructuré, et usant d'un minimalisme extrême à tous les niveaux qui déroute toujours autant aujourd'hui, la musique de Suicide tient sur des riens du tout, des mélodies de 3 notes qui se répètent ad nauseam et pourraient ne jamais finir, et c'est ça qui fait toute leur force. Ghost Rider, c'est le morceau qui ouvre ce premier album à la pochette ensanglantée, vous pouvez l'entendre dans le player à gauche ou ici en version live. Le riff de clavier est un marteau piqueur sur lequel se plaquent de longues couches aigües et synthétiques. Derrière, Vega éructe avec autant de classe que de folie des phrases qui sonnent comme des slogans et appellent des images mythiques de l'Amérique des années passées et poussiéreuses. "Ghost rider, Motorcycle Hero/Baby baby baby baby, he's looking so cute." Vous voyez des images, voile de brouillard devant les yeux, et là, ce crachat en 5 mots : "America is killing its youth." Tout est en lambeaux, et le riff continue de tourner encore et encore et encore pendant que le clavier aveuglant noie les cris bestiaux de Vega qui se dispersent dans l'écho.


Emilien.

mardi 16 mars 2010

[Vise un peu] Gil Scott-Heron - I'm New Here

Mea culpa ! J'ai la sale habitude d'être à côté de mes pompes quand il s'agit d'anticiper un disque de Gil Scott-Heron. Pendant longtemps je n'ai connu que ses deux premiers albums solo ("Pieces of a Man" et "Free Will", sortis respectivement en 1971 et 1972) et sa première collaboration avec Brian Jackson ("Winter in America" sorti en 1974) et je pensais, à tort, que l'âge et la drogue (dure) aidant, les nombreux autres LPs enregistrés par Gil durant les décennies suivantes, avec ou sans Jackson, seraient d'une façon ou d'une autre décevants, voire tristement ridicules. Dans la mesure où la demi-douzaine d'albums que j'ai découverts par la suite m'a convaincu, chacun à sa manière, j'aurais pu, j'aurais du me douter que ce nouvel album, signé chez XL Recordings (le label très inspiré de Richard Russell, qui s'occupe notamment des sorties de Radiohead, Beck ou encore Vampire Weekend) qui plus est, ne pourrait être le disque de papy, ringard et obsolète, que je semble tenir absolument voir Gil enregistrer avant de disparaitre (flinguez-moi).


(Me and the Devil)

"I'm New Here," autobiographie hésitant entre amertume, nostalgie et paix de l'âme est l'œuvre d'un vieil homme. Gil Scott-Heron n'est certes plus le jeune type fringant qui contribuait à inventer le rap avec The Revolution Will Not Be Televised ou qui rivalisait de groove sur le très sous-estimé (et un brin vulgaire) "Moving Target" (1982), et sa voix est celle d'un homme usé par les années, qui revient sur son enfance difficile (On coming from a Broken Home), ses addictions et ses multiples emprisonnements (Me and the Devil) de façon humble et sincère, avec l'aide de fans de la première heure, invités à participer à l'enregistrement (Damon Albarn joue du clavier et Richard Russell lui-même produit et co-écrit trois morceaux).

(Where did the Night go)

A l'image du propos, la forme est on ne peut plus modeste. En passant directement du blues urbain (New York is Killing Me) à la soul (I'll take care of you, en écoute sur votre gauche), de la folk (I'm new here) à un spoken word rèche et rappelant le trip hop de la fin des 90's (The Crutch), Gil (prononcer Guile) dessine un patchwork retraçant sa vie et sa carrière, sans pour autant s'y enfermer à double tour : l'album cite Kanye West, samplé sur les deux parties de On Coming From a Broken Home, et Gil reprend Bill Callahan (I'm New Here), Robert Johnson (Me and the Devil) et le soulman Brook Benton (I'll take care of You) en réinventant entièrement les chansons. "I'm New Here" est un livre ouvert, aéré par six courts interludes, qui se lit vite (moins de 30 minutes) et appelle à une relecture fréquente tant il est juste et touchant.

Richard Russell et Gil Scott-Heron

La vie de Gil Scott-Heron n'a pas été rose et, si j'espère que ce disque ne sera pas son dernier (auquel cas ma théorie du final en eau de boudin tomberait à plat), il n'en demeure pas moins un legs gravé sur microsillon offert à ceux qui ont tant appris de la musique de Gil (Russell le premier) et à ceux qui ne verraient en lui qu'un vieux schnoque. Avec "I'm New Here" il propose une fenêtre sur les rues de New York, telles qu'un vieux briscard peut les voir, désabusé, fatigué, se souvenant de ce qu'elles étaient et de ce qu'elles auraient pu être.



Joe


[Réveille Matin] Black Violin - Brandenburg

Le réveille matin d'aujourd'hui conviendra non seulement à ceux qui se lèvent pour aller bosser mais aussi à ceux qui vont à peine se coucher, encore un peu saouls ! Semaine street cred' oblige, laissez-moi vous présenter les deux mecs de Black Violin.

Brandenburg est la plage introductrice de l'album éponyme du groupe sorti en 2007 dont les 16 pistes voient les beats les plus hip hop se mélanger aux cordes des violons. La grande force de cet album réside dans la surprise qu'il crée chez l'auditeur (ce mariage improbable entre le hip hop et une composition plus classique est assez efficace) mais peu de pistes marquent l'esprit et les oreilles sinon ce Brandenburg (une des seules pistes uniquement instrumentales de l'album). Il est vrai que si l'auditeur peut aisément se laisser happer par cette introduction, plus on avance dans l'album et plus il perd de sa force.




Le violon est l'un des instruments dont la tessiture s'approche le plus de la voix humaine. Il est donc de ces instruments qui font directement écho à nos sens, il est l'instrument du pathos, du sentimentalisme, de l'affect... Je ne rechigne pour ma part jamais a écouter les suites pour violoncelle de Bach ou le concerto pour violons Opus 35 de Tchaikovsky ; les violons y sont les plus beaux jamais entendus et vous arrachent les larmes des yeux. Mais le violon, parce qu'il est tellement lié à l'affect, peut également

devenir vulgaire, romantico-puéril, pseudo-intellectualisant. On pensera par exemple à la b.o. de "Requiem For A Dream" qui a dépassé le stade de musique de film pour devenir musique
d'ado pré-pubère en mal d'amour. Tout y est trop sentimental, trop fort, sans retenue et le violon y perd sa richesse et sa force. Je vous parle de ça parce qu'il existe plusieurs groupes dans la même veine que Black Violin (Nuttin but Stringz, Escala, etc.) qui n'ont pas compris ce qu'il fallait faire de cette union insolite. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dis, je ne me permettrais pas de comparer Black Violin à Bach ou Tchaikovsky, mais on peut au moins leur accorder qu'ils ne sombrent pas dans le pathétique.


Alors, maintenant, sortez votre Ghetto-Blaster du placard, descendez dans la rue avec vos potes et allez zoner au son des violons hip hop, vous aurez trop de swag!

Julien


Et si vous préférez les violons les plus beaux, procurez-vous l'une des meilleures interprétations des suites pour violoncelle de J.S. Bach


lundi 15 mars 2010

[Réveille Matin] A Tribe Called Quest - Check the Rhyme

Bonjour à tous ! Cette semaine, nous consacrerons la majorité de nos lignes à des artistes issus de la rue, de force ou par chance, et à leurs itinéraires pas franchement gâtés. Et qu'on se le dise, ça n'est pas parce que j'ouvre le bal avec un bon vieux simple de hip hop old school que nous ne parlerons que de rap !

Cependant, il me semblait de bon ton que de vous parler d'A Tribe Called Quest, l'un des meilleurs groupes à avoir éclos sur la Côte Est des États Unis à la fin des années 80. Pas toujours aussi connus que Public Enemy, le Wu Tang Clan ou encore De La Soul, il ont pourtant sorti un paquet de LPs majeurs entre 1990 et 1994, dont mon favori, le second, "The Low End Theory" possédait la pochette la plus bath.

Dans le hip hop comme partout ailleurs, c'est souvent à la spécialité que ça se joue. ATCQ n'étaient pas aussi politiques que Public Enemy. Ils n'étaient pas un "clan" au sens où l'entendait le Wu Tang. Certes ils avaient très bon goût en matière de sampling (beaucoup de jazz, de basses et de cuivres), et savaient lancer des beats à la fois puissants et groovy, mais ce qui fait la différence selon moi, c'est avant tout la voix nasale de Q-Tip, MC bavard et beau gosse (dont le dernier album solo, "The Renaissance" est sorti en 2008 et est méchamment bien). J'aurais d'ailleurs pu choisir un morceau sur lequel sa participation est plus prononcée que sur Check The Rhyme (en écoute dans le lecteur sur votre gauche), mais cela aurait été manquer l'occasion de débuter la semaine avec ces mots de Phife Dawg : "Now here's a funky introduction of how nice I am." Les présentations sont faites, j'espère que vous vous entendrez bien avec ces trois-là.


Joe