C'est entendu.

jeudi 25 août 2011

[They Live] Route du Rock 2011

Pour notre toute première virée officielle du côté de Saint Malo, nous avions assemblé une équipe de choc, préparé des K-way, affinés des looks les moins hipsters possibles et prévus des boules Quiès pour résister aux assauts sonores, sinon visuels, de la pire chienlit au Monde en dehors des esquimaux communistes partouzeurs de droites et des kaddhafistes : les jeunes cons.




Vendredi 12 Août

Un road trip (trop) long (pour être vrai), des erreurs de parcours et enfin C'est Entendu débarque sur le camping de la Route du Rock, trop tard pour voir Anika (dont Matt RucaMilda, un lecteur underage motivé et passionné, nous dira du bien plus tard dans la soirée) mais pas pour rater l'intégralité du set de Sebadoh.


(Il ne fallait pas louper cette seconde chance en moins d'un mois de rattraper le temps et de voir Electrelane)

Apparemment peu convaincants en début de set, on aura eu droit à un Sebadoh-de-festival surmotivé à notre arrivée. Laissant Jason Lowenstein au micro, Lou Barlow était recourbé sur sa basse, les cheveux lui fouettant le visage tandis que le trio envoyait du gros son avec les chansons qui d'après Barlow sont "celles sur lesquelles on peut le moins se planter". Avec la réédition cette année de "Bakesale", c'est tous les tubes indie de 94 qui y passent ou presque : Magnet's Coil, License to confuse, S. soup, et pour finir le set, un très grand Give up, la rencontre documentée du heavy metal et de l'indie pop, jouissive en plein soleil et on se met à espérer que le groupe sorte pour de bon un nouvel album prochainement, alors que pour Electrelane, on n'espère plus rien (le groupe est séparé entre deux continents) si ce n'est une nouvelle chance d'assister à ce qui ressemble à une tournée d'adieux supplémentaire. Comme en Juillet à Paris, les quatre anglaises jouent avec les tripes leur kraut-pop et tout le public de sauter, de "ooh ooooh"-er sur On parade, et de prendre sa dose de boucan avec U.O.R. et The Partisan, lorsque Verity Sussman sort son saxophone. Le set est plus court qu'à Paris mais il n'en a pas l'air, et donne même l'impression, public survolté aidant, que Mia Clarke est encore plus jolie et qu'Emma Gaze cogne plus fort ses futs. Pendant que ces gros nazes de Mogwai s'évertuent à faire mollement remuer les trentenaires (le post rock comme équivalent post-générationnel du heavy metal donne l'impression de voir des adulescents aux cheveux longs croire encore en Ozzy quand le mec ne vaut plus rien) et à jouer très fort leur très mauvaise musique, nous réalisons qu'un tiers du public n'a absolument rien à foutre de ce qui se passe sur scène, et attend, imperturbable que tous les rockeurs dégagent pour tripper sur AFX. Mais ça n'est pas encore l'heure. Jouer du math-kraut-post-electro-rock pépère en studio ou devant son ordi, c'est chouette. L'adapter efficacement sur scène, c'est autre chose. Alors que leur premier LP est plutôt bon (on vous en parlera bientôt), le moins que l'on puisse dire est que les quatre membres de Suuns n'arrivent pas à lui donner vie en live. Même les titres les plus accrocheurs de l'album sont assez confus : le gros riff d'Armed For Peace qui aurait dû dévaster la fosse s'est avéré mort-né, noyé dans un amas de sons trop propres pour être honnêtes. Etienne Jaumet, aperçu en train de danser devant ses machines, jouant des extraits de son "Night Music" (2009) devant les électeuffeurs commençant à s'échauffer, n'aura eu droit qu'à un court set (une bonne idée, d'ailleurs, que ces mini-sets sur la petite scène de la Tour, précédant les derniers concerts de chaque soir) avant que la foule des adorateurs (et des curieux) ne s'agglutine devant Aphex Twin, planqué dans la pénombre et ne donnant à voir que son spectacle habituel de morphing sur les visages des spectateurs, un classique indispensable mais un peu lassant à la longue, tout comme l'électronique proposée ce soir-là par Richard D. James. Un set "festival" magistralement démarré par de belles déflagrations sonores, une agression à la mesure de l'ambition du show visuel... avant que James ne fasse (sans surprise) évoluer son flot de sons vers un BOOM BOOM bête et méchant tout juste bon à contenter les nombreuses personnes venues ce soir-là pour fumer des joints et remuer leurs grands bras maigres sous des casquettes sales. Temps de rentrer au camping, bébé.

Regardez les concerts d'Anika, Sebadoh, Mogwai, Suuns et Electrelane, filmés par Arte Live Web.



Samedi 13 Août

Une visite rapide à St Malo histoire de s'acheter des bottes ne fut pas vaine : après une journée grise, la pluie commence à tomber à peu près au moment où les concerts du Fort St Père démarrent et ne s'arrêtera de tomber que le lendemain matin.

(La légende du Fort Saint Père n'est pas galvaudée : la gadoue était partout)

La journée démarre pour nous avec le set de Low, sans surprise majeure si ce n'est l'adhésion assez massive, même si (ou justement parce que) polie et respectueuse du public, d'expérience peu séduit par les compositions très lentes du trio dans les festivals (on se souvient encore des huées reçues dans les arènes de Nîmes en 2003 de la part d'un parterre de fans idiots de Radiohead). Les extraits de "C'mon" (dont un Nothing but heart plus que convaincant, et même probablement le moment le plus tendu de tout le festival, de quoi donner envie de redonner sa chance au disque) dominent mais ne monopolisent pas un set où les bons classiques (Canada, Last snowstorm of the year, Sunflowers) côtoient les nouveaux indispensables (Murderer et un Monkey dont le chant est légèrement décalé, pour en accroitre la tension). Les néophytes apprécient poliment sans forcément adhérer (difficile dans un festival) tandis que le(s) fanatique(s) chantent les mots en chœur avec Alan Sparhawk et Mimi Parker. Après ça, le show sucré de Cults, peu professionnel et inintéressant au possible, ressemble à un cliché de musique pop (la chanteuse trop sympa entourée de mecs aux cheveux longs trop concentrés meeeec) et on attend impatiemment le retour de Blonde Redhead, dont la dernière tournée (en 2007, pour supporter "23") n'avait pas laissé un souvenir impérissable et dont le dernier album nous avait profondément déçus. Pourtant on y croit, et on a raison. Exception faite de chacun des extraits de "Penny Sparkle" joués ce soir, le groupe se montre bien plus énergique et convaincant qu'il y a quatre ans, jouant les meilleurs passages de "23", quelques beaux passages de "Misery is Butterfly" et l'inévitable In Particular. Un moment de flottement voit Kazu Makino s'asseoir et affirmer qu'elle est fatiguée et ne jouera donc plus de guitare. Qu'à cela ne tienne, sa fatigue ne l'empêche pas de se lancer dans Equus, le disco-punk abrasif tiré de "Misery". Rien, pas même la mauvaise idée de rallonger le set d'un titre (l'un des pires de "Penny Sparkle"), rien ne nous aura semblé plus épique que ce set aux deux tiers fantastique joué par nos idoles d'antan sous une pluie battante, nos K-way cédant, nos voix se brisant pour suivre celle de Kazu, laquelle ne manquait pas de remuer ses gambettes nues comme une jeune pucelle à chaque occasion. Une heure de plus à mariner dans le froid, planqués parmi les sardines pressées sous la tente du Village Labels pendant que Dirty Beaches tentait de convaincre plus courageux que nous et The Kills faisaient leur apparition tandis que nous grelottions, tenaces et curieux bien qu'épuisés. En dépit de nos craintes, aucun groupe n'accompagnait le duo et ils n'avaient d'ailleurs besoin de personne pour occuper l'espace sonore et physique de la grande scène du Fort. En dehors des nunucheries récentes (pas prépondérantes, mais il a tout de même fallu s'envoyer le heavy reggae de Satellite et la ballade piano bar The last goodbye), un show entamé par un No wow survolté ne peut qu'être un bon show, preuve qu'il n'est peut-être pas encore temps de renier les Kills. Pas tant qu'ils n'auront pas publié un second très mauvais disque d'affilée, en tout cas. Après ça, pas question d'attendre Battles pour vérifier qu'on n'en a rien à fiche et il est encore moins question de prendre une voiture embourbée direction St Malo pour voir jouer Cheveu à 3h30 du matin. L'organisation du festival est loin d'être idéale et vue la météo, rien ne peut battre le retour au camping vers une humidité limitée et les hurlements (incessants de 2h à 11h du matin) des jeunes cons imbibés préférant apparemment jouer à la balle dans un camping boueux plutôt que d'assister aux concerts. Des singes.

Regardez les concerts de Still Corners, Low, Blonde Redhead, The Kills et Battles filmés par Arte Live Web.



Dimanche 14 Août

Épuisés par les hectolitres d'eau reçus sur la figure pendant des heures la veille, dépités par les amas de boue recouvrant chaque once de terrain, nous fuyons à St Malo, histoire de faire un peu de tourisme, de manger une glace devant la Mer, et espérant croiser Frànçois Marry sur la plage.

(Frànçois & The Atlas Mountains, en plein délire dancefloor de fin de set)

Une esbalade dans les rochers de la Plage du Bon Secours de Saint Malo en plein après-midi et enfin on arrive sur le sable, face à la scène où Frànçois & The Atlas Mountains, récemment signés chez Domino, ont déjà commencé à jouer. Pas vus depuis un an et demi, le groupe a gagné en assurance et les morceaux issus de "Plaine Inondable" (2009) sont joués de façon différente, mais Frànçois est toujours pieds nus et le groupe continue à sauter en harmonie, à sourire et à donner l'impression de s'amuser. Les nouvelles chansons ne pouvaient que s'épanouir dans l'atmosphère du mois d'Août à Saint Malo et qu'elles soient en français ou en anglais, donner enfin l'envie d'attendre le très prochain nouvel album. Même le peu convaincant single, Allons à la piscine, déformé à l'extrême et transformé en mix électronique pour clore le set, s'est enfin révélé. Même si la pluie semble ne pas menacer, la nuit précédente ne nous encourage pas à assister à l'intégralité des concerts et nous zapperons donc Here We Go Magic et Okkervil River (Ces derniers étant de toute façon perdus à tout jamais, corps et biens, dans une americana post Arcade Fire de très mauvais goût. Leurs derniers sursauts datent de 2007), n'arrivant que pour voir Cat's Eyes, le groupe parallèle de Faris Badwan (The Horrors) se lancer dans une reprise bruyante du Lucifer Sam de Pink Floyd (circa Barrett). Le set le plus court du festival (une petite demie heure) et le plus mignon, aussi. Certes, même avec une reprise, le groupe n'avait pas énormément de matériau brut à nous jouer mais il faut bien comprendre que la moitié des chansons de l'album (celles chantées par Rachel Zeffira, des bluettes surannées) ne se seraient pas adaptées aisément au contexte d'un festival. On leur pardonne. On peut tout lui pardonner à Faris. Ses disques ne sont jamais fabuleux mais ils sont mignons. Ce mec avance à son rythme, il découvre les différentes branches des arbres musicaux au fil des ans, et il se dit "ah oui, c'est joli ça, je vais faire ça maintenant", et c'est totalement naïf. Il ne rend hommage à personne, il ne table pas sur les modes, il fait ça comme ça lui vient, au fur et à mesure qu'il écoute des disques. C'est mignon. Les barbus de Fleet Foxes n'ont par contre fait que confirmer tout l'ennui pressenti à l'écoute de leur deuxième album. Quelques sursauts sur Mykonos et une ou deux autres compositions, un Helplessness Blues raté (comme beaucoup d'autres morceaux) par la faute d'un groupe folk trop "heavy" et l'impression persistante que le concert eut été beaucoup plus intéressant si Robin Pecknold et J. Tillman avaient été seuls sur scène. On aurait alors mieux apprécié les harmonies vocales, mieux entendu la belle guitare de Pecknold et évité que tout ne soit que bouillie indiscernable. Maaaais on n'est plus en 63 et on n'est pas au Newport Folk Festival et la folk fonctionne certainement mieux aujourd'hui auprès du public quand elle est "lourde". Dommage. Une galette jambon fromage plus tard, Crocodiles arrive comme la véritable découverte du festival, le groupe que nous espérons super bon eeeeeet... ça n'est pas le cas. Un chanteur ridicule arborant un t-shirt à l'effigie de Rimbaud, absolument insupportable, popstar-wannabe sans aucune charisme et des chansons inintéressantes une fois sur deux, de quoi vous dégouter du premier album (publié en 2010) qui n'avait pourtant pas l'air si mal, et ce sera notre dernier concert du weekend, tant pis pour Dan Deacon et Mondkopf. On lève le camp.

Regardez les concerts de Here We Go Magic, Okkervil River et Cat's Eyes filmés par Arte Live Web.


La fournée de cette année n'était peut-être pas dignes des line-ups précédents mais suffisamment variée pour satisfaire tout le monde, de quoi confirmer de bonnes et de mauvaises impressions et quelques sets vraiment remarquables (Blonde Redhead, The Kills, Electrelane, Low ou même Sebadoh et Frànçois). L'organisation du festival, en net progrès d'après les habitués, a tout de même une marge de progression devant elle, en matière de recours face aux intempéries et surtout vis à vis des lieux concernés par la programmation (un concert d'après midi regroupait Chelsea Wolfe et Josh T. Pearson, mais il fallait payer un supplément au forfait 3 jours et se rendre à St Malo, le concert de Cheveu était lui aussi payant et se jouait hors du Fort à 3h30 du matin, autant d'artistes qu'on aura donc payés pour... ne pas voir). L'année prochaine, vous nous raconterez vos souvenirs. Nous privilégierons sans doute Barcelone, un temps sec et la meilleure programmation festivalière au Monde en nous rendant deux mois et demi plus tôt au Primavera Festival. A moins que la prog' de la Route du Rock ne soit fantastique, bien sur...


(Joseph Karloff à gauche, Joe Gonzalez à droite, à la sortie du Fort, Dimanche soir)



Texte : Joe Gonzalez & Joseph Karloff
Photos et motivation : MLE
Rumeurs et bruits de couloir : Arthur Graffard et Matt (RucaMilda)

9 commentaires:

  1. Putain la photo finale mec ! On va se faire un album chillwave, ça va pas trainer.

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  2. A part ça, parfait compte-rendu. Je m'y suis retrouvé sauf pour Fleet Foxes que j'ai aimé malgré un son vraiment misérable qui n'était à mon avis pas de leur fait, c'était un peu la tendance générale du dernier jour, les ingés son devaient avoir vomi sur la console la veille.

    (Je précise que je n'ai écrit que le passage sur Suuns)

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  3. Battles pue la merde on est d'accord!

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  4. Joe, t'aurais du foutre des alinéas pour séparer les concerts !

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  5. Je préferais pas. Tel que c'est ici, ça s'enchaine comme ça s'enchainait là-bas.

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  6. Pour Crocodiles j'ai eu l'occasion de les voir à la flèche d'or et je te rejoins totalement
    je trouve que le chanteur surjoue et que ça sonne trop pompier en live pour être honnête, dommage le dernier disque (pochette violette? c'est le second) est vraiment cool
    ce qui m'avait surpris à Paris c'est de voir un public à fond sur ce groupe que je pensais plutôt de connaisseurs, du coup je leur prédis un assez bon avenir en tout cas j'ai pas eu l'occasion de voir une telle effervescence pour un groupe en concert aussi souvent que ça cette année (il y a eu aussi La Femme mais eux étaient à la hauteur à mon avis)

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  7. J'avoue avoir pas tout lu. M'en veux pas. Me bastonne pas. Les trois quarts des groupes soit je les connais pas soit je m'en fous pas mal. Et quand on connaît pas, entendre parler des concerts c'est moyen. Même quand on connaît parfois, genre Low je connais, mais le concert sous la flotte ça me passionne pas totalement, ceci dit j'ai lu, la preuve. Je me trahis parce qu'en fait j'ai lu putain. A Nîmes ils se sont fait huer par les connards de fans de Radiohead et tout ça. Je lis tout même quand je m'en fous. J'ai surtout lu tout ce qui concernait la pluie, les tantes, St-Malo, et Joseph K. en photo chillwavée, c'est ça qui m'intéressait dans cet article, être un peu à l'intérieur de vous. Toute façon j'aime pas la zique. Mais vous je vous adore.

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  8. cat's eyes c'est pas un dessin animé? est-ce que ce groupe a beaucoup de fans?

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  9. Arte je pensais qu'ils diffusaient des bons trucs

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