C'est entendu.

vendredi 20 janvier 2012

[Réveille-Matin] Tom Waits - King Kong

C'est sans doute futile et superficiel (ceci est un magazine consacré à la musique populaire, what did you expect ?) mais j'adore, vous le savez, disserter autour de thèmes aussi creux que "qui mérite la couronne de Roi de la Pop ces jours-ci ?". Ergo l'élection annuelle de la POPsonnalité de l'année. Depuis que Michael Jackson est mort (je ne parle pas de sa mort clinique mais de celle de l'artiste en lui), la bataille a fait rage, inlassablement, et s'il est difficile d'élire un seul et unique héritier du titre, il n'est pas secret que j'ai mon idée sur la question. Seulement voilà, un Roi de la Pop se doit d'être le plus connivent, le plus séducteur possible. Il doit à la fois se placer bien au-dessus de la mêlée, et continuellement impressionner. Il doit être surhumain. De ce point de vue-là, il lui existe des antagonistes, des revers de médaille noircis, des artistes au moins aussi impressionnants que lui, mais dont l'aura ne pourra jamais satisfaire les masses (bien-pensantes). Des puissances de l'ombre dont le pouvoir s'exerce sur ceux qui se veulent perpétuellement en opposition. Je ne parle pas, bien entendu, de Jean-Luc Mélenchon, mais plutôt d'une noblesse artistique n'ayant jamais fait allégeance à la Royauté, et plus particulièrement d'un leader séditieux, alcoolique, romantique, expérimentateur, usé et malpropre, le Roi de la Jungle, Tom Waits.





Réapparue en 2006 sur la triple compilation "Orphans" (constitué de raretés et d'inédits de Waits), King Kong était originellement destinée à participer d'un effort commémoratif du "petit génie schizo de la pop", Daniel Johnston. La compilation "The Late Great Daniel Johnston : Discovered Covered" était une fantastique occasion pour le jeune homme que j'étais en 2004 de se faire une éducation indie. Sur l'un des deux CDs, il y avait pléthore d'artistes, du plus anecdotique groupuscule amerloque (Thistle) aux plus grands. Mercury Rev, Flaming Lips, Sparklehorse, Teenage Fanclub, Jad Fair, Starlight Mints, Eels, Vic Chesnutt, Beck et même TV on the Radio reprenaient des chansons de Daniel Johnston et ils les reprenaient avec panache ! Je ne savais pas très bien qui était ce Daniel Johnston, mais en voyant le titre du disque et la pochette, j'imaginais un obscur songwriter "classique" (à la Randy Newman) récemment décédé. Sauf que sur le second CD, on pouvait trouver les versions originales des morceaux, chantés par Daniel Johnston de sa voix de crécelle chancelante, plutôt plus que moins lo-fi, et le type n'était même pas mort, il continuait même à enregistrer des disques. Une sorte de livre d'histoire de l'indie-rock fait sur mesure dans lequel je me suis plongé mille fois, pile au moment où le genre atteignait ses derniers sommets. A la toute fin de la playlist, Daniel Johnston chantait a-capella le scénario du long-métrage "King Kong", avec les mots qu'aurait choisi un gamin de 8 ans. Ces mots-là, grognés par le Roi Tom depuis le fond de sa caverne, tandis que de sa voix samplée il bâtit le décor du film, ces mots n'ont plus rien d'enfantin et quiconque refuserait de courber l'échine devant un tel suzerain se verrait à coup sûr tabassé à mort puis jeté du haut d'un building pointu.


Joe Gonzalez

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