C'est entendu.

mardi 7 décembre 2010

[Vise un peu] Une ribambelle d'Eps

2011 approche et comme tout obsédé du cadre annuel qui se respecte, j'aimerais vous présenter le maximum de disques sortis en 2010 avant la date fatidique, histoire que vos tops soient plus complets (flinguez-moi). Prenons ensemble la dernière ligne droite, et commençons par quatre EP's avec du boire et du manger :

Girls - Broken Dreams Club

Ce qui nous avait séduit chez Girls en 2009 n'est plus là, désolé de flinguer le suspense. "Album" était bon parce qu'il avait un propos, pas parce qu'il sonnait bien et malgré tout le mal que s'est donné Chet Jr. White pour faire sonner cet EP encore mieux que l'album (avec des cuivres et des basses franchement remarquables), on ne décolle jamais vraiment en écoutant ce disque, et ce par la faute de Christopher Owens, qui a écrit là des chansons plates et tout juste bonnes à rameuter la horde des trentenaires en mal d'eighties (Felt, Costello et autres héros de l'indie pop anglophone de l'époque). Je veux dire, "Album" parlait de faire de la musique, d'être adolescent et d'en jouer ; on en ressortait avec l'envie de saisir une guitare et d'enregistrer des popsongs avec un ami, alors quid de ce Club des Rêves Brisés ? La lune de miel est-elle déjà terminée ? Owens est-il lucide quant à son propre avenir dans le business ? Je n'en suis pas convaincu. Cette collection de chansons mélodramatiques est simplement une occasion de plus pour ses fanatiques d'écouter Owens crooner toute sa mélancolie-trop-cool sur des rythmes ralentis et parfois franchement ringards (Broken Dreams Club, sa guitare lapsteel de cowboy et ses paroles à la Creep-pour-danser-le-slow). En vérité, le vide interstellaire qu'on aimerait voir comblé par une voire deux idées (on n'en demande pas plus !) n'est pas loin de rappeler la niaiserie du Bright Eyes post-2005, à savoir une sorte d'indie rock américain mou du genou en roues libres, inoffensif et inévitablement emmerdant.


(Broken Dreams Club)

Je n'enterre pas Girls pour un EP (même pas complètement raté, en témoignent certains passages de Heartbreaker et Carolina), mais m'avoue forcément déçu. Il y aura, c'est certain, un second LP et c'est avec lui que nous jugerons plus définitivement s'il convient de ranger la carcasse de Christopher Owens dans la grande boite des songwriters-mouchoirs usagés.









Kurt Vile - Square Shells

Auteur de deux albums en 2009, Kurt Vile est un bourreau de travail et son EP (7 chansons) a l'allure d'un court album dont la production, riche et légère, en fait l'un de ses meilleurs disques.

Globalement, Vile combine toujours de la même façon (maline) des chansons composées sur une guitare acoustique à des errements psychédéliques aérés (en témoigne la très belle coda d'Invisibility : Nonexistent, la pièce maitresse de presque huit minutes) où expérimentations sonores, bruits et autres superpositions de guitares se chargent de ne jamais perdre l'attention de l'auditeur, un art qu'il faut savoir apprécier (on pensera à Desire Lines de Deerhunter ou N°13 Baby des Pixies).


(Invisibility : Nonexistent)

Ce n'est certainement pas avec ce disque somme toute peu bavard que l'on s'acoquinera le plus facilement à la musique de Kurt Vile, qui s'exprime de façon plus directe sur ses trois LPs et sur les enregistrements de son groupe, The War on Drugs, mais ce bon EP est l'occasion de découvrir un jeune talent américain qui n'a cure de la chillwave, ne se soucie pas de son image et enregistre chaque année un paquet de bonnes chansons.







The War on Drugs - Future Weather

Parlons-en justement du groupe de Kurt, puisque la troupe menée par le chanteur Adam Granduciel, dont je vous avais dit beaucoup de bien en 2008, a fait paraitre cette année un EP assez long, lui aussi.

Si l'on y retrouve la guitare de Vile, il faut bien se dire que le registre est ici différent : le psychédélisme a ici davantage de punch, emmené par la batterie et la voix plus énergique de Granduciel. Plus propre sur lui que le premier album du groupe, cet EP confirme les espoirs placés en eux : Baby Missiles est une suite logique du style rock psychédélique éprouvé en 2008 avec la tuerie Buenos Aires Beach, A pile of tires rappelle que le groupe aime conserver un minimum de lo-fi dans leur son et The history of plastic que leurs intentions sont hippies et non-violentes. Le point d'orgue du disque est cependant la magnifique ballade Brothers où Vile et Granduciel amènent la musique folk américaine plus loin : si Grizzly Bear prolongent l'œuvre de Simon & Garfunkel depuis quelques années, alors les frères de The War on Drugs ont trouvé un moyen de faire fructifier l'héritage de Bruce Springsteen (celui de "Nebraska" ou "Tom Joad" et pas un autre).


(Brothers)

Évidemment, il manque de chansons, ce disque-là, empli qu'il est de digressions psychédéliques (parfois proches de l'ambient) et d'interludes. Mais ce n'est qu'avec plus d'impatience que l'on attend désormais le second LP du groupe, qui sera certainement une passionnante alternative à tout ce que les années '10 semblent avoir comme proposition psychédélique obligatoire (de Tame Impala à Animal Collective).









The Tallest Man on Earth - Sometimes the Blues is just a passing bird

Vous devez commencer à connaitre ce gars-là, un suédois plutôt grand, dans la droite lignée folk de Bob Dylan (voix nasillarde comprise) dont les deux premiers albums (2008 puis 2010) figurent déjà dans la collection de l'amateur de musique traditionnelle américaine qui se respecte.

Avec cet EP, Kristian Matsson n'apporte rien de nouveau. Cinq chansons, dont quelques unes sont plutôt pas mal (Like the wheel, Tangle in this trampled Wheat) mais pas vraiment de pas en avant, ni pour nous chanter la politique de son pays d'origine ni non plus pour nous détailler les malheurs de notre Monde. Pas un mot (car il s'agit ici de mots, pas de musique, les arrangements entourant la guitare et la voix de Matsson étant inexistants) sur quoi que ce soit d'autre que les quelques aventures du plus grand mec sur la Terre, qui cette fois-ci n'est pas allé faire la bamboula à Barcelona, que nenni. Contrairement à Dylan, qui avec chaque album se faisait prophète d'une génération, voix de son temps, Matsson se contente de chanter ses petits problèmes et ses petites joies. Il n'appartient qu'à lui de me démontrer le contraire avec son prochain disque, mais après deux LPs et deux Eps consacrés à sa petite personne, aisément universalisable certes, j'ai acquis la conviction que Tallest Man On Earth n'était qu'un chanteur de blues, comprenez un petite gens muni d'une guitare, un chroniqueur du quotidien... c'est à dire tout l'inverse d'un porte-étendard.


(Tangle in this trampled Wheat)

Peu importe me diront ses amateurs, et après tout, ses chansonnettes, il les joue plutôt bien, et on aime les écouter, alors pourquoi pas ? Disons que l'on risque de finir par s'en lasser à la longue, mais cette fois encore, laissons-le nous divertir et rien d'autre.






Joe Gonzalez

1 commentaire:

  1. C'est une tof de mon trou-de-balle la pochette de The War on Drugs ? On dirait. Parce que pour être plus exact, dans mon trou-de-balle, c'est plutôt The War tout court en ce moment. Une guerre sale au gaz moutarde avec tranchée unique.

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