C'est entendu.

mercredi 9 novembre 2011

Microcosme #13 - Novembre 2011

par Joseph Karloff
art par Jarvis Glasses

Personne ne nous l'a, à ma connaissance, encore reproché, mais sur C'est Entendu, nous parlons parfois d'artistes que nous côtoyons personnellement. D'aucuns pourraient y voir une vaste entreprise de copinage éhonté, mais la vérité est toute autre : non seulement ces gens sont talentueux, puisqu'on a envie d'en parler, mais en plus ils sont sympathiques, puisqu'ils sont nos amis. Donc, oui, un de mes homies s'est caché dans ce numéro derrière un précurseur de la blaxploitation, et si tu le retrouves, souhaites-lui donc son anniversaire, il te paiera une bière.

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Microdisques

Nos régions ont du talent
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La tension est palpable au moment où Lisa Duroux et Elizabeth Hargrett montent sur scène, pour ce qui sera leur seconde apparition en tant qu'Alligator. Pourtant, les deux jeunes filles ont eu leur lot de concerts avec leurs formations respectives. Mais ce soir, elles n'ont que les quelques minutes que leur accorde leur poignée de chansons pour convaincre la petite foule venue voir quelqu'un d'autre, à peine plus que pour un télé-crochet, et pas le moindre artifice sur lequel se reposer confortablement. Une basse, une batterie, deux voix : de quoi s'agripper fermement aux racines de la pop en guettant les turbulences.




Au premier rang, François Virot, superstar underground locale, trépigne. Car il sait à quoi s'attendre. Et pour cause : c'est lui qui a eu le bonheur d'enregistrer les cinq titres de "Alligator". Quatorze minutes qui définissent la pop. Ceux qui se demandent chaque jour si Electrelane va oui ou non refaire un album peuvent chasser le quartet de leurs pensées et commander immédiatement l'album des deux Liz, car cet EP n'a rien du médicament générique de substitution : on se le repasse en boucle, encore et encore, en se demandant si l'on n'a pas rêvé cet enchaînement aussi parfait que l'annonce télévisée des cinq bons numéros du Loto.




Sur scène comme sur cassette (oui, puisqu'on parlait récemment de supports, "Alligator" est disponible en téléchargement ET en cassette), le duo franco-américain séduit d'emblée : fascinante, Lisa hypnotise par son jeu unique, comme si Dora l'exploratrice nous expliquait la batterie. Un socle sans faille sur lequel Elizabeth déroule ses riffs de basse pour donner vie à des titres aussi géniaux que Cycles, chanson anodine au premier abord qui se révèle d'une profondeur inouïe. Crocodile Dundee peut se la péter et briser du saurien tant qu'il veut sur les chaines de la TNT, il ne pourra rien face à ces deux alligators-là, et vous non plus. Laissez-vous dévorer : c'est dans l'ordre des choses.






J.K.



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Microscope

C'est là que les bactéries se développent
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A la rédaction, j'ai la réputation d'être ce que l'on appelle communément une "tapette". Bien sûr, je ne suis pas le seul à souffrir de ce genre de rumeurs : on raconte que Joe s'envoie un shot de tequila-armagnac avant chaque papier en hommage à ses origines latino-pyrénéennes, que Lamuya porte des sous-vêtements à l'effigie de Manuel Göttsching, ou même que Thélonius pourrait écrire un article très prochainement. Il faut dire qu'à l'instar de Tony Parker ou de Bernard Diomède, mes stats parlent pour moi : plus de la moitié de mes chroniques concernent des artistes que l'on pourrait aisément ranger dans la catégorie gay-friendly, et quand je dis friendly c'est surtout pour ne pas heurter ma mère.




Pourtant, je suis un putain d'enfant du rock, fils de Kurt, petit-fils de Jimi et neveu par alliance de Bruce Dickinson. Et quand un groupe de rock se pointe chez moi, jette mes pédales de réverbe et ma batterie électronique par la fenêtre, branche son matos sans dire bonjour et met direct les potars à 11, je dis banco et lève le poing, l'autre main étant occupée à composer nerveusement le 17. We Are Van Peebles est de cette trempe-là. Ce trio rennais a digéré Sonic Youth, Deerhoof et Battles, et propose quelque chose d'assez fou, une sorte de math-punk complexe et jouissif : du Slint sous Prozac. Le jeu de batterie est phénoménal, le son est lourd, le rendez-vous est pris.


J.K.



Nous autres francophones aimons à nous dire que dans de nombreux pays, le français est synonyme de classe et de distinction. Combien de magasins japonais arborent fièrement une devanture "bonne croissant fleuri" ? C'est oublier un peu vite qu'on sert surtout de lexique lubrique aux Américains trop puritains pour sortir leur langue plus loin que le perron de leur chapelle.




Vous l'aurez deviné, le groupe Cours Lapin n'est pas français pour deux sous. Mais pour deux couronnes, faut voir, car c'est du Danemark que nous viennent ces french lovers dont la chanteuse a pour particularité de ne chanter qu'en français. Leur premier album, passé relativement inaperçu, s'offre enfin un joli vidéoclip, près de deux ans après sa sortie. Langue oblige, et ce malgré un fort accent dont l'origine est franchement impossible à déterminer même pour ceux qui ont pris Björk 2ème langue, difficile de ne pas rattacher la musique de Cours Lapin à des références bien de chez nous (pas forcément flatteuses), Emilie Simon et Emily Loizeau en tête. Mais on y perçoit aussi des influences évidentes et bienvenues du coté de Stéréolab ou de Brodecaste, en moins dream et en plus pop, qui font de ce groupe plus qu'une curiosité. Espérons que pour son prochain album (imminent), Cours Lapin ne s'enferme pas lui-même dans le zoo qu'on risque de lui aménager, à deux pas des agences publicitaires pour téléphonie mobile et des studios de Taratata.


J.K.

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