C'est entendu.

jeudi 7 octobre 2010

[Réveille Matin] Kahimie Karie - Night Train

Chut. Doucement. Vous vous rendez compte du raffut que vous faites ? Vous martelez votre clavier. Vous baillez bruyamment. Votre respiration est un moteur d'avion. Même quand vous vous grattez les cheveux, c'est un vrai capharnaüm. Ne bougez plus. Shhhh. C'est de Kahimie Karie dont je souhaite m'entretenir avec vous ce matin, alors il est temps de prêter l'oreille, parce que son niveau vocal dépasse rarement les 30 db, et qu'elle ferait passer Jane Birkin pour une chanteuse de punk rock. C'est d'ailleurs ce qui la rend si unique : que ce soit depuis ses premiers albums décalés complètement shibuya-kei (ce style jazz-pop 60's un peu suranné et tokyoïte ayant pour représentants Pizzicato Five ou Flipper's Guitar) sur lesquels je reviendrai un de ces jours jusqu'à ses derniers essais plus expérimentaux et silencieux, Kahimi Karie a toujours cultivé cette même voix toute en chuchotements et respirations proches du micro qui a su charmer des gens aussi divers que Philippe Katerine ou Otomo Yoshihide qui lui ont écrit des morceaux depuis le début de sa carrière il y a déjà 18 ans. Et si on ajoute à cela que cette pure chanteuse
s'autorise des percées dans la langue française qu'elle écrit elle même, sérieusement, comment ne pas tomber sous le charme?


Extrait de "Nunki", son très silencieux et exigeant avant-dernier album sorti en 2006 (le dernier vient tout juste de sortir cet été), le morceau que je vous propose d'ouïr ce matin à de quoi vous donner envie de remettre votre pyjama pour vous rendormir dans un train de nuit ronronnant. Et pourtant, là où certains entendront de l'ennui pur, d'autres auront le plaisir de découvrir une guitare délicate composée et jouée par Jim O'Rourke, l'exilé le plus cool, sur laquelle Kahimi nous susurre en un collage doucement poétique des phrases telles que "Le train passe sur l'oreiller/Où est-elle en ce moment la petite fille avec les cheveux longs ?". Les silences ici sont aussi importants que le reste, peut être plus. Et si l'accent de Kahimi empêche de vraiment comprendre ce qu'elle chante, c'est pas grave, c'est comme si vous retrouviez cet état curieux de la fatigue où vous entendez des bribes de mots sans pouvoir rester assez éveillé pour en comprendre parfaitement le sens global. Et j'aimerais vous en dire plus sur ce morceau là, mais je ne peux pas, mes yeux se ferment inexorablement, je tape maintenant les paupières fermées, définitivement fermées, mes doigts sont lourds, ma tête tombe, je n'entends même plus la musique, je ne, je vais, il, la, je ne, ah, hmm,


Emilien Villeroy

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