C'est entendu.

mardi 5 janvier 2010

[Réveille Matin] Th' Faith Healers - Heart Fog (et plus encore...)

On a tous notre vision particulière du rock des années 90. Années de disette pas possible pour les uns, âge d'or pour les autres, ou alors période d'entre-deux qui annonçait un renouveau fort. La réponse est quelque part entre ces trois extrémités sans doute, mais il en reste un son très particulier qui a tendance à revenir encrasser les oreilles de nos jours avec des revivals pas toujours très heureux. Le rock des années 90, tel que je le vois, il est un peu mou, il est un peu crasseux, il a mis le volume de ses guitares trop fort ce qui risque de déclencher du larsen, et avec ses grands yeux vitreux, il joue des morceaux qui sont quand même un peu bancals. Et si dans ce genre là, on a surtout compté sur les Américains (pour le meilleur - Pavement - comme le pire - The Smashing Pumpkins - j'attends des commentaires outrés d'ex-fans, forcément, de ce groupe surfait), il y avait aussi des anglais pour sortir le grand jeu, et parmi eux Th' Faith Healers, groupe tellement oublié qu'on en viendrait à douter qu'il existe.


Formé en 1990 pas très loin de Londres, le groupe a été le premier à sortir des singles sur le label Too Pure qui venait d'être crée à l'époque, et leur batteur a même joué sur les premiers albums de leurs camarades Stereolab. Un peu comme ces derniers, en plus d'être des jeunes gens noisy inspirés par le shoegaze très à la mode, le quatuor avait un certain faible pour le krautrock, le groupe allant même jusqu'à enregistrer une reprise de Mothersky de Can sur leur premier album, "Lido," en 1992. Mais du rock allemand, plutôt qu'un groove intelligent ou des recherches soniques poussées, ils ont surtout retenu un certain sens de la répétition infinie des mêmes thèmes et des morceaux qui se déploient en longueur. Et c'est sur leur second album, "Imaginary Friend" (1993) qu'il l'exploreront le mieux, une fois dépouillés de toute le côté un peu brutal de leur premier essai, et n'ayant gardé finalement que le principal.


Si cet album est si attachant et puissant finalement, c'est parce qu'il est à la fois très efficace, voire même assez adolescent dans ses mélodies ou dans les thèmes de ces paroles ("don't give me a conscience/give me a reason"), mais rajoute aussi à cela des tas de petites idées très matures qui ont le temps de s'étaler sur des morceaux étirés en longueur. Un peu comme si les Breeders de 1991 avaient décidé d'être moins froids et secs et de se laisser le temps de faire évoluer les morceaux, et le résultat est admirable. Des énormes guitares qui font des riffs façon barbelés de Sparklingly Chime jusqu'aux 20 minutes de Everything, All At Once Forever dont le titre est un programme musical tenu avec brio, cet album se révèle être un oublié injustifié des années 90. Pour preuve, le morceau que je vous propose d'écouter dans le player à gauche ce matin, à savoir Heart Fog, peut être le tube de l'album malgré ses quasi-7 minutes. Avec sa basse linéaire façon Kim Deal (encore elle) et ses guitares qui passent du très doux au très fort, c'est un petit chef d'oeuvre de variation d'humeur, avec de surcroit la douce voix de Roxanne Stephen qui répète "feel so insecure..." entre deux explosions soniques.


Emilien.

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