Tout comme les Cramps, le Gun Club ramenait les morts à la vie. En plein mouvement punk rock, ces jeunes hommes de Los Angeles pratiquaient leur vaudou non pas sur les cendres d'Elvis et Dick Dale mais sur la tombe de Robert Johnson, le bluesman de la légende, celui qui est sensé avoir vendu son âme au Diable un soir sur les bords du Mississippi pour qu'il lui offre de jouer de la guitare comme personne, et qui connut une fin tragique à un jeune âge.
Ces Frankenstein du blues partageaient beaucoup avec les Cramps, à commencer par Kid Congo Powers, le guitariste fondateur du Gun Club aux côtés du chanteur et guitariste Jeffrey Lee Pierce. Powers quitta le groupe pour rejoindre les Cramps au tout début des années 80 avant d'y revenir en 1984. Et puis ce look destroy proto-grunge dont Pierce se fit un parangon, et dont la mèche blonde, les mauvaises habitudes (l'alcool, les drogues) et le parcours difficile (après le Gun Club et quelques bons albums solos, Pierce se retrouve fauché et malade avant de mourir à 37 ans d'une hémorragie cérébrale) en font une sorte de Kurt Cobain avant l'heure.
Jeffrey Lee Pierce tenait cependant moins du gamin emo encombré par son rôle de star (ce que Cobain allait se révéler être) que de la rock star assumée et empreinte d'un charisme sexuel certain, ce qui le rapprocherait peut-être plus de Jim Morisson. Si les musiciens du Gun Club contribuaient à rendre ses blues violents et énergiques avec force bottlenecks, Pierce leur donnait avec sa voix de gamin sûr-de-lui-même-s'il-chante-faux une tension sexuelle palpable (sur For the love of Ivy, par exemple, où il est entièrement maitre de l'Acte) et ses hurlements juvéno-canins sur Preaching the Blues sont à mille lieues de Johnson et convaincront le dernier des ennemis du blues de jeter les armes.
Joe Gonzalez
P.S. : Quoi écouter ? Les deux premiers albums du Gun Club (le second date de 82 et s'intitule "Miami") son des classiques sans aucun faux pas. Les deux suivants valent qu'on s'y attarde et notamment "Las Vegas" en 1984 avec le retour de Powers à la guitare. L'album "Wildweed" de Pierce en 1985 est aussi une pièce de choix. Enfin, sachez qu'un documentaire sur Pierce a été tourné mais qu'il est difficile à se procurer, contrairement à "The Jeffrey Lee Pierce Sessions Project", une compilation de reprises des chansons de Jeffrey Lee par une palanquée d'artistes tels Nick Cave, Debbie Harry, Mark Lannegan et d'autres, sortie en CD en 2009.
Je kiffe bien !
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