Pourquoi Dieu est-ce si difficile d'être français (*) et de faire des chansons sérieusement ? Pourquoi doit-on absolument nier sa terre natale pour espérer obtenir une once de crédibilité quand on a la malchance d'évoluer dans notre cher hexagone ? Pourquoi doit-on troquer la langue de Molière contre celle de Shakespeare pour ne pas se couvrir de ridicule dès la première phrase du premier morceau ?
Notez bien que ce n'est pas le tout de chanter en anglais : encore faut-il parvenir à éradiquer toute trace de camembert dans sa voix pour ne surtout pas sonner comme un français-qui-chante-en-anglais. Une étape essentielle que n'a pas encore franchie le chanteur de The Delano Orchestra : pourtant, physiquement, il partait plutôt bien, avec son look de leader de The National qui se nourrirait exclusivement de racines. Mais son accent, cumulé à un timbre pour lequel il s'échine à compenser l'absence de chaleur par une tendance à gémir dès que l'occasion se présente, constitue le frein principal pour envisager avec mansuétude l'heure qui se profile en sa compagnie ; on pense à Sparklehorse certes, mais seulement pour se dire qu'avec Mark Linkous, ça fonctionne mieux.
(The Escape, live @ Fnac Indétendances 2008)
Fort heureusement, le chant n'est pas le cœur de la musique du Delano Orchestra. Le groupe joue une sorte de post-rock timide qui, dans ses meilleurs moments (instrumentaux, cela va sans dire), transmet une vraie émotion, surtout quand la trompette devient l'instrument lead. Le reste du temps, facile à suivre, agréable à écouter, le groupe peine à vraiment retenir l'attention, même lors des fameuses "montées" inhérentes au genre. Le jeu de scène du groupe évoque les meilleurs moments du shoegaze ; aussi, l'auditeur distrait se demandera plutôt si le batteur est le père de l'un des musiciens, et s'il fait exprès de laisser le timbre de sa caisse claire vibrer bruyamment lors des intros calmes.
Une dernière montée, et le groupe cède sa place à Syd Matters, l'éternelle révélation Inrocks saluée par la presse française. A chaque album, c'est le même constat : pas mal. Premier LP : pas mal. Second LP, un double album : pas mal. Troisième LP, qui marque pourtant un changement de direction dans le songwriting : pas mal. Leur nouvel album, je vous le donne en mille, est pas mal. Et en live, ça donne quoi ?
Joseph Karloff
(un jour, plutôt que de vous parler de groupes français gentils, je vous parlerai de cette fantastique salle qu'est l'Epicerie Moderne)
(*) Ca vaut aussi pour les Wallons. Moins pour les Québécois, curieusement.
Une dernière montée, et le groupe cède sa place à Syd Matters, l'éternelle révélation Inrocks saluée par la presse française. A chaque album, c'est le même constat : pas mal. Premier LP : pas mal. Second LP, un double album : pas mal. Troisième LP, qui marque pourtant un changement de direction dans le songwriting : pas mal. Leur nouvel album, je vous le donne en mille, est pas mal. Et en live, ça donne quoi ?
Bingo. Oh, tout est très bien fait, l'exécution est bonne, les chœurs sont bien placés, les membres du groupe sont gentils et souriants, il y a du handclap repris par le public, des silences respectés, tout le monde chante, certains musiciens changent d'instruments au gré des chansons, bref tout cela devrait prendre, mais rien à faire, on décolle à peine plus haut que le nombril, c'est un mal français je vous dis. En plus, contrairement à The Delano Orchestra qui avaient pour eux une gestion du volume précise et délicate, Syd Matters aborde cet aspect avec la finesse de Slipknot : il y a les moments C'EST FORT ALORS TU TRIPPES et les moments C'EST PAS FORT ALORS TU T'ÉMEUS.
(To All Of You, live @ La Maroquinerie, 2010)
Enfin, on a aussi eu droit à un saupoudrage aléatoire de rythmes supposés africains pour faire genre Vampire Weekend j'imagine, mais, je vous le dis comme je le pense, se mettre à faire du zouk pour faire décoller une chanson, ça passe quand on s'appelle Francky Vincent, moins quand on s'appelle Syd Matters.
Joseph Karloff
(un jour, plutôt que de vous parler de groupes français gentils, je vous parlerai de cette fantastique salle qu'est l'Epicerie Moderne)
(*) Ca vaut aussi pour les Wallons. Moins pour les Québécois, curieusement.
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