C'est entendu.
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jeudi 12 novembre 2009

[Réveille Matin] Tiny Tim - Livin' in the Sunlight, Lovin' in the Moonlight

Alors comme ça, je vois qu'on veut causer falsetto sur C'est Entendu? On veut de la voix haut perchée qui vibre? Alors laissez passer, parce que je vous apporte du très lourd là. Laissez tout tomber. Voici, pour vous, le héros oublié des cordes vocales extensibles, le maître absolu de la voix de tête : Herbert Butros Khaury, plus connu sous le nom de Tiny Tim.


(Livin' in the Sunlight, Lovin' in the Moonlight)

Quoi, vous connaissez pas Tiny Tim? Chanteur américain absolument culte, Tiny Tim était peut être la personne la plus joyeuse au monde, ou alors l'une des personnes les plus cinglées, c'est au choix. S'inspirant du bon vieux easy listening des années 30-40, fan absolu des veilles chansons populaires (il était un spécialiste sur le sujet) qu'il reprenait au ukulele ou avec orchestrations surannées, chantant des paroles toujours plus optimistes sur des petites mélodies mignonnes, il faisait une musique absolument incompréhensible qu'on a eu vite fait de classer dans la "Novelty music", la musique pour rire quoi ; oui, on écoutait ça parce que c'était drôle à entendre, un peu ridicule, un peu bête, et tellement too much. On prenait pas ça au sérieux.

Mais c'était passer totalement à côté finalement. Tiny Tim était avant tout un excentrique joyeux et cultivé qui croyait en ce qu'il faisait, et quand il se mettait à chanter à la télévision un truc comme "Tip-Toe Through The Tulips" au ukulele avec sa voix sur-aiguë, c'était pas pour rire. Reprenant plein de standards à sa façon, avec cette voix absolument unique qui vous met un sourire aux lèvres en dix secondes montre en main, Tiny Tim était unique et sonnait vrai. Avec cette ambiguïté entre le sérieux et la parodie chez les auditeurs, il est rapidement devenu un chanteur culte, l'outsider ultime. Au sommet de sa popularité à la fin des années 60, il était payé 50 000$ l'apparition à Las Vegas, et se maria même en direct à la télévision en 1969 avec Miss Vicky, une fille de 17 ans. Devant plus de 40 millions de téléspectateurs médusés, un couple impossible, un gateau de mariage de 2 mètres de haut et 10000 tulipes pour décorer le plateau. L'entertainment américain à son meilleur quoi.

Mais revenons à la musique, car Tiny Tim a sorti plusieurs albums jusqu'à sa mort en 1996, et parlons un peu du premier d'entre eux, "God Bless Tiny Tim", sorti en 1968. Un classique de pop nostalgique et vieillotte, un petit chef d'oeuvre de simplicité désarmante de naïveté, l'album dont vous avez besoin sans le savoir. Orchestre enchanté sur la plupart des morceaux (parfois remplacé par quelques guitares un peu rock&roll mais pas trop!), reprises folles, moments où Tiny Tim fait des duos avec lui même en alternant sa voix normale et son fameux falsetto, ou lançant des "thaaaank youuuu, thankkk youuu" sur des enregistrements d'applaudissement, histoire de faire comme si c'était en public. Tout est là pour vous faire passer 41 minutes ailleurs, dans un monde merveilleux où les gens sont heureux et la vie pleine de couleurs très vives, Mary Poppins semblant limite être un film de Lars Von Trier à côté. C'est non seulement très drôle, mais aussi un véritable feel-good album qui vous remonte le moral dans n'importe quelle situation, rempli de morceaux géniaux. Peut être l'une des expériences les plus psychédéliques, oui, VRAIMENT, des années 60. Sur le morceau que je vous propose d'écouter ce matin et que vous avez déjà dû écouter plus de 3 fois en vous disant "QUOI?", à savoir le parfait "Livin' in the Sunlight, Lovin' in the Moonlight", il faut entendre Tiny Tim, accompagné par des cuivres parfaits qui vous lance en rigolant : "I'm so happy, ah ah!/Happy go lucky me!/I just go my way living everyday!/I don't worry!/Worrying don't agree!/Things that bother you never bother me!". Et en écoutant ce morceau, on se dit que c'était peut être la vérité. Mais c'est pas grave. Parce que Tiny Tim sera toujours là pour vous grâce à ses merveilleux albums.

"God Bless Tiny Tim!"

Emilien.

lundi 9 novembre 2009

[Quitte ou Double] Falsetter n'est pas jouer, le Barock adolescent est-il pandémique ?

Il est grand temps de débattre !

Cette fois-ci je vous propose de vous pencher sur le cas de deux groupes très différents mais dont les chanteurs partagent la même ascendance et le même goût pour une certaine grandiloquence baroque et usent et abusent de leurs voix de fausset*.
Ce genre de chose ne sort pas de nulle part, bien évidemment, et l'on en a vu d'autres jouer le même jeu (risqué) et parvenir néanmoins à se trouver un public, je pense bien sûr à Muse, mais aussi pourquoi pas à Joanna Newsom et on peut même remonter jusqu'à Tim Buckley, père de, qui entre 1967 et 1971 était en quelque sorte le champion incontesté de cette catégorie, mais tous ceux là agissaient en sous-marin et dans leur coin.


Tim Buckley - Goodbye and Hello

Ils n'étaient pas plusieurs sur le même bisteak au même moment, ce qui n'est pas le cas de ceux dont je vais vous entretenir, et c'est pourquoi j'aimerais que vous me disiez, tout d'abord, ce que vous pensez de chacun d'entre eux, et ensuite, si vous pensez que ça ne fait pas un peu trop de manières en trop peu de temps. Votre coupe est-elle pleine ou est-ce que vous avez encore de quoi offrir le gîte à deux ou trois autres de ces types-là ? Car il y en a d'autres. Découvrons ensemble ...


I - Un circuit de Montagnes Russes sur le dancefloor, une certaine idée de la pop conçue par les Wild Beasts :

Ils viennent de sortir leur deuxième album ("Two Dancers") en deux ans, Wild Beasts, malgré ce nom, ne sont que quatre anglais qui ne font peur à personne, ni avec leurs bouilles de braves gars ni avec leurs voix qui montent et qui descendent, et dont la musique n'a pas vraiment pour vocation de vous agresser, mais plutôt de faire parvenir à vos corps (vos jambes si possible) l'énergie qui habite leurs textes. Si en lisant cela vous vous attendez à quelque chose de véritablement dansant, détrompez-vous ! Seuls les plus agités ou défoncés au speed parmi vous pourrait remuer suffisamment sur la musique des Wild Beasts pour appeler ça de la danse.



Non, réellement, leur pop autant inspirée par Kate Bush que par Arcade Fire n'est "dansante" que par rapport à leur album précédent "Limbo, Panto" et aussi parce que les morceaux reposent le plus souvent sur la batterie, laquelle habillée de guitares légères et claires, n'est pas sans évoquer à la fois la musique africaine et la pop anglaise telles qu'on les connaissait dans les années 80 (comme s'ils avaient à la fois écouté les Bhundu Boys et Echo and the Bunnymen).



Leurs deux chanteurs se partagent le boulot, mais l'un comme l'autre ont tendance à régulièrement appuyer sur leur pédale à falsetto pour faire décoller leur lyrisme et cela est précisément ce qui fait leur charme et leur originalité (sans cela, on les taxerait probablement d'avoir écouté Foals entre leur premier et leur second album, et puis c'est tout), mais c'est aussi ce raffinement, qui ne colle pas forcément à leur look, et vous pourrez dire ce que vous voudrez, un tel fossé (sans jeu de mot) entre l'image et le son n'est jamais bon pour gagner un large public, c'est aussi ce raffinement donc, qui pourrait bien leur causer du souci quant à devenir ou non un groupe qui vous plaira, à vous, chers lecteurs.


II - : Une ballerine marque son territoire langagier, Parenthetical Girls et les violons de mon coeur :

Du côté de Parenthetical Girls, les choses sont sensiblement pas les même. Ils sont quatre, certes, et en sont eux aussi à leur second album, mais le leur, "Entanglements," est sorti l'année dernière, et ils sont américains. Et surtout, leur look et leur musique sont on ne peut plus accordés.

Deux garçons, une (jolie) fille et un chanteur androgyne au possible, du maquillage aux yeux en passant par la coiffure, les postures et bien entendu la voix, qui ne se contente pas de s'envoler mais insiste aussi puissamment sur les consonnes et tente tant bien que mal de faire muter les aspérités consonantiques de la langue Anglaise en autant de salves d'élégance glam, alors que derrière lui, un groupe nouvellement acquis à Michel Legrand (le précédent album était plutôt orienté machines) s'évertue à réveiller la Grandeur Olympiesque d'une Revue de Variété telle qu'on n'en avait plus vu passer depuis les années 60.


Unmentionables

Les nouveaux amours de ces filles entre parenthèses (nom que l'on sent imaginé par le chanteur Zac Pennington, qui nage décidément dans des eaux vieilles de 50 ans depuis quelques années, déjà) sont peut-être vieillots – reprendre Les Moulins de mon Coeur de Michel Legrand (en écoute dans le lecteur) est quelque peu osé, tout comme sortir un single en hommage à Ellie Greenwich, dont les kids n'ont jamais entendu parler, avouons-le (à moins qu'ils n'aient lu ce qu'il fallait) – il n'en reste pas moins que l'on peut se demander combien s'en seraient tiré aussi bien avec un postulat de départ si flageolant.



C'est à vous de vous exprimer. Quid de ces deux groupes ? Quid de cette tendance un brin passéiste ? Votez au sondage, exprimez vous dans les commentaires, faites entendre votre voix.


Joe


* La voix de fausset, ou falsetto, est aussi appelée "voix de tête" et chez l'homme représente la voix aigüe, non naturelle, que les plus bêtes parmi nous appellent à l'occasion "voix de tata."