Ce n'est pas la première fois que je vous en parle ; les morts de Jhonn Balance en 2004 et de Peter Christopherson en 2010 ont laissé un vide dans le paysage de la musique expérimentale post-(post-)industrielle. Si les disques de Coil n'étaient pas tous parfaits, le groupe faisait partie de ceux qui, même après vingt ans, parvenaient à rester aussi passionnants qu'au premier jour — et les mélomanes qui suivaient les actualités du groupe avaient toujours de quoi se réjouir, le groupe ayant toujours de nombreux projets en cours. À tel point que le site du groupe chez Brainwashed comporte aujourd'hui toute une section dédiée aux projets qui n'auront jamais vu le jour : "International Dark Skies", "Anarcadia", "Pop Concrete"… et "Wounded Galaxies Tap at the Window" dont la version originale était censée sortir il y a dix ans et faire suite aux deux "albums roses" qu'étaient "Queens of the Circulating Library" (une longue piste minimaliste, un drone avec un texte récité par une ex-chanteuse d'opéra) et "Constant Shallowness Leads to Evil" (un album de noise) ; le disque était annoncé comme psychédélique, probablement hypnotique ("a very tripped out 'spacey' workout"), et le titre provenait d'un texte de William S. Burroughs.
(How Acla Disappeared From Earth)
Ce n'est pas la première fois non plus qu'un titre de Coil se trouve réutilisé par un autre groupe avec lequel il tissait quelques liens, mais contrairement au projet How To Destroy Angels de Trent Reznor, Cyclobe a quelque autorité en la matière : les deux membres du groupe ont également fait partie de Coil (Stephen Thrower de 1987 à 1992 et Ossian Brown de 2000 à la fin), et le lien de parenté s'entend tout de suite même si les deux groupes ont leur propre identité sonore. On retrouve dans le travail de Brown et de Thrower une sensibilité proche de celle qu'ont développé Balance et Christopherson sur leurs derniers albums (ceux de la période "lunaire", hypnotique, avec de longues pistes aux harmonies étranges), mais qui prend des formes peut-être encore plus inhabituelles, plus animales qu'humaines, où les instruments traditionnels sont au premier plan plutôt que les synthétiseurs et la voix.
Passée l'ouverture How Acla Disappeared From Earth, "Wounded Galaxies Tap at the Window" choque presque par son étrangeté et sa dissonance apparente. Le son de Cyclobe semble habité par un bestiaire imaginaire de sons étranges, qui semblent avoir leur racine (lointaine) dans certaines musiques celtiques traditionnelles mais auraient subi un traumatisme et auraient évolué en autarcie dans un univers étranger, tordu, illogique — un univers d'une fascinante étrangeté et d'une inquiétante beauté.
Passée l'ouverture How Acla Disappeared From Earth, "Wounded Galaxies Tap at the Window" choque presque par son étrangeté et sa dissonance apparente. Le son de Cyclobe semble habité par un bestiaire imaginaire de sons étranges, qui semblent avoir leur racine (lointaine) dans certaines musiques celtiques traditionnelles mais auraient subi un traumatisme et auraient évolué en autarcie dans un univers étranger, tordu, illogique — un univers d'une fascinante étrangeté et d'une inquiétante beauté.
(Sleeper)
Il faut une vraie curiosité pour s'aventurer dans The Woods Are Alive with the Smell of His Coming, qui décontenance, questionne et ne donne aucune réponse (réponse ?) le long de ses seize minutes : une mélodie au xylophone est répétée sur des bourdons, des grondements/grincements, des cordes qui semblent au bord du déchirement, tout semble tourner de travers même à l'apogée de la piste où plusieurs instruments reprennent de concert, presque avec violence, la mélodie initiale. We'll Witness the Resurrection of Dead Butterflies, où l'inspiration celtique traditionnelle s'entend clairement, évoque à la fois une joyeuse épiphanie et un requiem déchirant ; Sleeper, en trois parties, débute de manière atonale (et relativement classique) mais devient aussi irréelle que le titre laisserait imaginer, avec une belle mélodie au piano (et le moment où une voix féminine appelle les noms d'Acla, d'Enoch… dans je ne sais quelle langue semble venir d'un rêve). Enfin, la piste-titre de l'album finit sur une note à la fois conclusive et apaisée mais laisse l'auditeur avec le tournis, au bout d'un voyage déroutant, avec l'envie de comprendre un peu plus ce qu'il s'est passé dans ce monde dérangeant — et de remettre le disque sur la platine.
Dire qu'il m'aura fallu du temps pour apprécier "Wounded Galaxies Tap at the Window" est presque un euphémisme (c'est d'ailleurs la raison — mes excuses — pour laquelle je ne parle de l'album que maintenant alors qu'il est sorti en vinyle depuis octobre dernier, même si l'édition CD est toute récente). Pourtant, l'étrangeté, le caractère unique de l'album le rend irrémédiablement attirant — et une fois qu'on s'y accoutume, le voyage vaut le coup d'être vécu, tant ces compositions recèlent un monde extraordinaire (dans les deux sens du terme). Le flambeau est passé, ce n'est pas demain que s'éteindra la flamme ésotérique de l'England's Hidden Reverse !
— lamuya-zimina
Dire qu'il m'aura fallu du temps pour apprécier "Wounded Galaxies Tap at the Window" est presque un euphémisme (c'est d'ailleurs la raison — mes excuses — pour laquelle je ne parle de l'album que maintenant alors qu'il est sorti en vinyle depuis octobre dernier, même si l'édition CD est toute récente). Pourtant, l'étrangeté, le caractère unique de l'album le rend irrémédiablement attirant — et une fois qu'on s'y accoutume, le voyage vaut le coup d'être vécu, tant ces compositions recèlent un monde extraordinaire (dans les deux sens du terme). Le flambeau est passé, ce n'est pas demain que s'éteindra la flamme ésotérique de l'England's Hidden Reverse !
— lamuya-zimina
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