Mon ami Arthur Graffard me disait l'autre jour "pour moi c'est le dernier groupe punk qu'il reste". C'est un peu excessif, nous avions bu, mais ça n'est pas parce qu'une phrase est exacerbée qu'elle est à rejeter en bloc. Les Furs ne sont pas le seul groupe à proposer sur scène une énergie digne de ce que le mot "punk" peut encore pouvoir signifier, mais ils sont par contre le dernier que j'ai eu la chance de voir en action.
J'ai toujours préféré, et de loin, Handsome Furs à Wolf Parade, le groupe dans lequel Dan Boeckner officiait jusqu'à il y a quelques semaines en tant que co-songwriter. Il y avait dans les chansons qu'il écrivait pour WP (et pour Atlas Strategic avant ça, au début des 00's) trop de compromis et pas assez d'exubérance émotionnelle pour me convaincre totalement. Ce qui n'a commencé que comme un side-project de couple en 2007 (avec un album certes charmant mais trop timide, "Plague Park") était déjà devenu bien plus qu'une passade avec l'album suivant, que j'avais porté aux nues en 2009. Wolf Parade s'est désormais retiré de la scène et plus rien ne peut s'opposer à l'épanouissement définitif des Furs.
(Cheap music)
En somme, "Sound Kapital" ne surprendra pas énormément les amateurs de "Face control" puisque la thématique s'en rapproche. En 2009, Boeckner et Perry publiaient un LP nourri de leurs tournées à petit budget tout autour du monde, et notamment en ex-URSS où l'étouffement des libertés avait forcément titillé la fibre contestataire de Boeckner. Cette fois c'est une excursion en Birmanie (soyons modernes et appelons ça le Royaume du Myanmar) qui l'a inspiré. Les difficiles conditions auxquelles sont confrontées les scènes locales (échapper à la vigilance des autorités, trouver du matériel, obtenir du courant électrique) aura donné à réfléchir à un américain se désirant punk et s'imaginant le retour au pays et le regard nouveau porté aux conforts matériels (When I get back). La description passionnée du boucan produit par les jeunes birmans, telle qu'elle est jouée par les Furs sur Cheap Music (sur le même schéma : rock lo-fi à tendance bruyante) vaut à elle seule les dix John Peel qui ne nous diffusent pas de musique underground birmane puisque de toute façon là-bas... "there's no radio". Comme pour rendre hommage à ce son underground, l'album est bien moins propre que "Face control" et réclame de toutes ses forces que vous poussiez votre jauge de volume vers le haut, histoire de faire résonner un peu plus la musique de ce peuple, couplée ici avec l'esthétique vulgaire, vulgarisante des synthés dance très 80's qu'Alexei Perry couple à des drum machines minimalistes à des fins d'efficacité propagandiste.
(Serve the people)
(Cheap music)
En somme, "Sound Kapital" ne surprendra pas énormément les amateurs de "Face control" puisque la thématique s'en rapproche. En 2009, Boeckner et Perry publiaient un LP nourri de leurs tournées à petit budget tout autour du monde, et notamment en ex-URSS où l'étouffement des libertés avait forcément titillé la fibre contestataire de Boeckner. Cette fois c'est une excursion en Birmanie (soyons modernes et appelons ça le Royaume du Myanmar) qui l'a inspiré. Les difficiles conditions auxquelles sont confrontées les scènes locales (échapper à la vigilance des autorités, trouver du matériel, obtenir du courant électrique) aura donné à réfléchir à un américain se désirant punk et s'imaginant le retour au pays et le regard nouveau porté aux conforts matériels (When I get back). La description passionnée du boucan produit par les jeunes birmans, telle qu'elle est jouée par les Furs sur Cheap Music (sur le même schéma : rock lo-fi à tendance bruyante) vaut à elle seule les dix John Peel qui ne nous diffusent pas de musique underground birmane puisque de toute façon là-bas... "there's no radio". Comme pour rendre hommage à ce son underground, l'album est bien moins propre que "Face control" et réclame de toutes ses forces que vous poussiez votre jauge de volume vers le haut, histoire de faire résonner un peu plus la musique de ce peuple, couplée ici avec l'esthétique vulgaire, vulgarisante des synthés dance très 80's qu'Alexei Perry couple à des drum machines minimalistes à des fins d'efficacité propagandiste.
(Serve the people)
N'ayons pas peur de nous l'avouer, Serve the people est une protest song, un hymne à la libération du joug des forces de "sécurité", aussi utopiste, beau et rassembleur qu'un Blowin in the wind ou un We shall overcome, mais moins naïf, avec une violence émotionnelle contenue (dans la voix de Boeckner et dans ce beat implacable) évoquant plus subtilement les grandes heures de Public Enemy. Le genre de chanson où l'on sent Boeckner bien dans ses baskets (sur scène il semble habité en la chantant), au point d'abandonner sa guitare pour accompagner sa femme au synthétiseur analogique.
L'affirmation cette fois entièrement assumée d'Alexei Perry n'est pas étrangère d'ailleurs à la réussite des chansons. Son apport à la musique des Furs ne sonne désormais plus comme des arrangements aux chansons écrites par Boeckner à la guitare. C'est presque l'inverse qui se produit (sur le single What about us, par exemple) et cette touche synthétique supplémentaire ne fait qu'aider plus encore les chansons à atteindre leur but : toucher l'auditeur, se faire entendre, et le bousculer (le corps ne peut rester insensible à une telle démonstration de beats, de toute façon).
Il en résulte l'avènement de tubes dancepunk aux thématiques improbables. Neuf, en fait, soit autant de chansons que compte l'album, lequel peut ainsi espérer atteindre sa cible en convertissant un nombre plus large d'auditeurs, s'il ne les repousse pas d'emblée avec sa pochette, que je me permettrai de qualifier de somptueuse, dans la lignée de celle de "Face control". En moins rentre-dedans, certes, mais ceux qui n'écouteront pas un disque parce qu'une femme nue en orne la pochette, ceux-là ne méritent que mépris, Lorie et Katy Perry.
L'affirmation cette fois entièrement assumée d'Alexei Perry n'est pas étrangère d'ailleurs à la réussite des chansons. Son apport à la musique des Furs ne sonne désormais plus comme des arrangements aux chansons écrites par Boeckner à la guitare. C'est presque l'inverse qui se produit (sur le single What about us, par exemple) et cette touche synthétique supplémentaire ne fait qu'aider plus encore les chansons à atteindre leur but : toucher l'auditeur, se faire entendre, et le bousculer (le corps ne peut rester insensible à une telle démonstration de beats, de toute façon).
Il en résulte l'avènement de tubes dancepunk aux thématiques improbables. Neuf, en fait, soit autant de chansons que compte l'album, lequel peut ainsi espérer atteindre sa cible en convertissant un nombre plus large d'auditeurs, s'il ne les repousse pas d'emblée avec sa pochette, que je me permettrai de qualifier de somptueuse, dans la lignée de celle de "Face control". En moins rentre-dedans, certes, mais ceux qui n'écouteront pas un disque parce qu'une femme nue en orne la pochette, ceux-là ne méritent que mépris, Lorie et Katy Perry.
(Bury me standing)
Si les Furs n'atteignent pas une véritable notoriété avec "Sound Kapital" (rien que la pochette pourrait leur attirer les faveurs des amateurs de phénomènes internet - même si je ne suis pas certain que ces gens-là soient le public à convaincre), on ne pourra pas dire qu'ils n'auront pas essayé. Pas de convaincre pour convaincre, pas pour le succès. Plutôt pour faire entendre des voix qui sans eux seraient moins audibles. Gageons que de toute façon, leur statut actuel permet aux Furs de faire à peu près ce qu'ils veulent artistiquement parlant et d'enchainer ces longues tournées peu lucratives dans des pays d'Asie orientale sans le sou. Là où naissent leurs albums. Si c'est le prix à payer pour qu'une telle musique continue d'affluer à nos oreilles, alors il vaut peut-être mieux que personne ne découvre le trésor de ces pirates-là.
Joe Gonzalez
P.S. : Les belles photos live sont tirées de la très chouette review. qu'a compilée Rory O'Connor (en anglais) du concert des Furs au Lincoln Hall de Chicago le 28 Janvier 2011.
Bien bel chronique, que j'ai lue en écoutant l'album de son pote Spencer Krug............. puis "Sound Kapital" ! :)
RépondreSupprimerbelLE !
RépondreSupprimerSublime article. Le meilleur ici depuis un bail. Le meilleur tout court ? En tout cas c'est de la bombe cet article ! De la bombe de balle.
RépondreSupprimerEt je te suis à deux mille pour cents sur ce groupe. C'est LE groupe. Das Groupe. C'est le top de la musique actuelle. Ces deux-là sont libres comme l'air, ils font une musique intelligente et qui donne une énergie terrible, une envie de remuer son fiac dans tous les coins. C'est le sommum de la zique de ce début de siècle. Je les ai vus sur scène et c'est un truc... C'est la beauté incarnée dans deux freaks.
Et l'artwork putain... On a le droit de se seiguer sur un artwork ?
RépondreSupprimerOn a putain le droit ! (merci)
RépondreSupprimerPréférer ça à Wolf parade quand même...
RépondreSupprimerque pensez vous de katy perry, physiquement?
RépondreSupprimerElle est pas très musclée.
RépondreSupprimerC'est un boudin, surtout si on la compare à ses sosies en mieux : Zooey Deschannel et ma préférée Lizzy Caplan.
RépondreSupprimermouéé...ces deux-la n'ont pas sa poitrine ni son sex-appeal..
RépondreSupprimerJe le découvre avec du retard et je me prends une baffe dans la gueule. Ah la vache Serve The People, c'est quelque chose.
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