J'étais arrivé un peu en retard. Devant la machine à café, le sourire en coin, Joe m'accueille sans un mot, simplement en me tapotant l'épaule. J'aime pas trop ça, surtout sa façon de glisser légèrement sa main sur mon dos avant de la retirer ; mais il est tactile, le chef. « Je te paie un café ? » me dit-il ; puis, considérant les vingt-deux centimes au creux de sa main : « Alors... Dix, vingt, vingt-et-un... Ah voilà Lamu qui arrive, hey Lamu, t'as pas d'la monnaie ? ». Non, Lamu n'a pas de monnaie. « Bah, tu te rattraperas en nous pondant un bon p'tit article sur un de ces zicos oubliés dont tu as le secret ! »
Le silence qui suit une question de Joe Gonzalez
est encore du Joe Gonzalez
est encore du Joe Gonzalez
Oui, Joe parle parfois comme une petite annonce Rock&Folk. Mais Lamuya-zimina n'a pas d'article non plus. Légèrement décontenancé, et réalisant que Julien Masure était absent pour quelques jours, Joe sécréta une discrète larme de sueur au coin du front. « J'avais pensé tenter un papier sur le nouvel EP de Sea Oleena », lui dis-je.
S'interrompant en plein milieu d'une blague impliquant Dominique Strauss-Kahn et Sœur Sourire, ainsi que divers objets dont je n'ai pas saisi la nature, Thelonius me lança : « Ça y est, le gay refoulé va encore nous gonfler avec sa Norah Jones. Fallait nous le dire tout de suite, Joe, que tu voulais que C'est Entendu devienne une succursale de Têtu, j'aurais amené mes panoplies, on aurait fait un lip dub corsaire sur du Panda Bear ».
Les blagues du matin de Thelonius (à droite) ne sont pas du goût de tous les collègues...
Hugo et Arthur se réfugient dans leurs gobelets tandis que Nina affiche un rictus gêné.
Hugo et Arthur se réfugient dans leurs gobelets tandis que Nina affiche un rictus gêné.
« Bon, mais tu as encore des choses à dire sur Sea Oleena ? » Inclinant la tête vers l'arrière, Joe m'invita à le suivre vers son bureau pour fuir le brouhaha ; d'aucuns auraient perçu dans ce geste une proposition indécente du genre vite-fait-bien-fait, mais je n'en suis plus aux tâtonnements échaudés des premiers jours. « Parce que ça va faire ton troisième... » « Quatrième. » « ...ton quatrième article sur elle en même pas un an, c'est beaucoup. Tu n'en parlerais pas plutôt dans le prochain numéro de Microcosme ? »
« Non Joe. Par ma barbe, cet album, j'en suis fou, pire que le chocolat Lanvin. Il n'est pas qu'un album sympa de plus dans cet horizon 2011 désespérément sympa. Là où son précédent EP tremblait pour maintenir le clou, celui-ci l'enfonce petit à petit, le martelant avec assurance au rythme des cymbales de Southbound. Ce morceau d'ouverture est l'un des plus beaux de l'année, et c'est sûrement parce que derrière, c'est six autres petits bijoux qui s'ensuivent. L'inquiétant Sleepless Fever, ritournelle pour dancefloors macabres, qui porte tellement bien son nom. Insomnia Plague, l'attente interminable avant et après le sommeil. Untitled, le tube indie folk dont j'ai toujours rêvé, avec un beau texte, une belle mélodie, immédiatement suivi par son jumeau maléfique Sister, dans une ambiance rappelant parfois le précédent EP. Milk est le RNB mou que CocoRosie aurait pu écrire si les moustachues se penchaient un peu plus sur leurs chansons et moins sur leur défi de réaliser les plus moches pochettes de tous les temps. Orion's Eyes est une conclusion attendue, convenue, mais surtout une invitation à recommencer le voyage. Bien sûr, le premier EP était déjà très bon mais il était badin, anodin. "Sleeplessness" ne joue pas dans la même catégorie. C'est un concept album qui rêve de rêver, mais qui est contraint de rester dans le réel. Je vais nous chercher des cafés. »
Le service compta de C'est Entendu euphorique
après les rumeurs de rachat de la boîte par Rock Sound.
après les rumeurs de rachat de la boîte par Rock Sound.
Joe me regarda partir, circonspect. Puis, tournant les yeux vers son gobelet vide, encore plus circonspect, il conclut par ces mots : « Il faut VRAIMENT qu'on se trouve des stagiaires ».
Joseph Karloff
Le premier morceau est très joli oui ! Je m'en vais écouter le reste de ce pas ! :)
RépondreSupprimerPour l'instant, c'est mon album de l'année. Devant le PJ. Et c'est aussi sûrement mon article de l'année. Je comze parce qu'il mérite plus qu'un comz. Même si un comz de Tank vaut dix comz anonymes.
RépondreSupprimerPourquoi le notez vous 4.5 ici et seulement 4 sur RYM?
RépondreSupprimer(Pour éviter de passer 15 ans à décider d'une note sur RYM, j'ai isolé 5 notes sur les 10 possibles. Et 4.5 n'en fait pas partie)
RépondreSupprimerAh, les notes…
RépondreSupprimerMoi c'est le contraire, c'est le fait de ne pas pouvoir mettre de quarts de points qui me fait hésiter trois plombes avant de noter un disque. Le dernier Seefeel vaut 3,25, le dernier Dirtbombs 3,75, le dernier Foetus 3,75… (et là je viens de finir le texte d'une critique mais je n'arrive pas à me décider entre 3 et 3,5 pour la note.)