C'est entendu.

mercredi 16 février 2011

[45 Tours Matinal] Les influences kraut de Geoff Barrow et Compagnie

Vous ne le savez peut-être pas, mais Geoff Barrow, c'est "ce gars dans Portishead". C'est vrai quoi, tout le monde n'en a que pour la façade, la chanteuse, parce que l'on sait reconnaitre sa voix, sa personnalité, d'emblée et si son nom ne vous dit rien non plus, il est plus probable que vous connaissiez malgré tout Beth Gibbons, ne serait-ce que parce que vous avez forcément déjà entendu Glorybox. Mais cessons de jouer à ce petit jeu, je doute que vous soyez de tels profanes, et si vous nous lisez, à moins d'être tombés là par hasard, vous êtes certainement des habitués et aujourd'hui nous sommes là pour approfondir le pourquoi du comment vous aimez et nous aimons Portishead.



(Chase the tear)

En 2009, un an après le retour fracassant de Portishead (via "Third", troisième album foutrement réussi), le groupe a enregistré un single dont les ventes furent reversés à une association caritative et ce qui est chouette, c'est qu'en plus d'être un parfait exemple de ce que j'aimerais vous démontrer, Chase the tear est aussi une très bonne chanson, qui n'aurait pas fait tâche sur "Third". Ça n'est pas seulement parce que Gibbons chante divinement bien, ni non plus parce que Portishead est le seul groupe à avoir su si efficacement décoller l'étiquette "trip hop" que certains voulaient le voir porter à ses débuts, et ça n'est pas non plus seulement parce que leur son est si précis, ambivalent et enveloppant que nous aimons Portishead. C'est aussi (je vous le donne en mille) parce que Geoff Barrow et les autres ont écouté pas mal de krautrock quand ils étaient petits. De NEU! à Kraftwerk en passant par La Düsseldorf et Cluster, la musique du groupe est telle une progéniture providentielle de la kosmische musik allemande des années 70 : elle s'étend, se déroule à une vitesse constante, hypnotique et vous fait voyager telle la répétition d'une idée mais quelle idée !



(Iron acton, par BEAK>)

Barrow a aussi monté un groupe autour de sa personne, cette année-là. BEAK> n'a sorti qu'un album ("BEAK>") mais Barrow semblait en avoir besoin, comme pour se délester de créations inachevées au sein de son groupe premier. Du coup, les morceaux de ce LP, quasi intégralement instrumentaux font parfois l'effet de compositions destinées à être accompagnées par la voix de Beth Gibbons... sauf qu'au lieu de paraitre incomplètes, de ressembler à des démos, ces pièces se tiennent et forment un tout plutôt réussi, malgré quelques errances, et là encore, les influences kraut de BEAK> ne sont pas à chercher bien loin, comme le prouve ce morceau qui après un peu moins d'une minute se lance dans un duo basse-batterie motorik comme à la grande époque et, finalement, pas besoin de guitare planante, psychédélique, pas besoin non plus de chant, le tournoiement-même de ces quatre ou cinq notes, reproduites à l'infini, sujettes à de minimes variations attendues, ce flot de pensée unique suffit à transporter l'esprit, à faire remuer le corps et à stimuler l'imagination.


Barrow et ses groupes ne sont certes pas les seuls à s'inspirer du krautrock trente cinq ans après les faits (on sait que Stereolab, Eine Kleine Natch Musik, Pas Chic Chic ou encore Sonic Youth s'en sont très bien sorti), mais au vu de leur réussite dans le domaine de la filiation post-allemande, il était de mon devoir de les rappeler à votre bon souvenir. Demain matin, on s'attaquera plutôt à un fondateur du genre, un vieux de la vieille, un groupe mythique !


Joe Gonzalez

5 commentaires:

  1. Les morceaux du BEAK> ont entièrement été improvisés en groupe et en une semaine, si je ne m'abuse, donc rien de destiné à Portishead et recyclé normalement !

    RépondreSupprimer
  2. La première image de "Chase the Tear", pendant une seconde j'ai cru qu'ils faisaient une partie de battaille navale.

    RépondreSupprimer
  3. Très sympa cette série d'articles (avec un thème on ne peut plus classe), je suis ça avec intérêt !

    RépondreSupprimer
  4. Pour être honnête, Chase The Tear, ça ressemble surtout énormément à I Feel Love de Donna Summer. Qui était certes, un peu du krautrock de discothèque. Mais tout de même. Pensez-y.

    RépondreSupprimer
  5. Ah oui tu n'as pas tort je n'y avais pas pensé, on peut quasi chanter I feel love I feel love I feel love I feeeeeeel looooove par dessus :D

    RépondreSupprimer