C'est entendu.

vendredi 10 décembre 2010

[They Live] Festival Les Inrocks 2010, Partie 2

Avant de vous raconter comment ça s'est passé, j'aimerais remercier encore une fois les Inrockuptibles (et leurs partenaires-gros-sous) sans qui nous ne pourrions tous les douze mois voir résumée un peu partout en France l'année écoulée avec ce que cela implique de bons et de mauvais groupes de scène. Ce festival a cela de particulier qu'il a valeur de compte rendu. Vous avez déjà pu lire les pros et cons de la soirée où l'on pouvait voir Midlake et Beach House, voici un bref rappel de ce qu'il s'est passé quelques jours plus tard, au Zénith de Paris, lorsque LCD Soundsystem est monté sur scène.


Seconde partie : Remuons nos pieds dans la neige fondue !


Ne me laissez pas commencer par une critique en règle des salles aussi grandes que le Zenith, je n'ai pas le temps pour ça, alors trouvez le frein, stoppez le train, et oublions que LCD n'a rien à foutre dans un stade ni dans une salle si grande où la moitié du public est assis. Ce qu'il est important de vous rapporter n'est pas dans le contexte, cela touche directement à l'interprétation, ou plutôt au manque d'interprétation. Blâmez l'acoustique de la salle, blâmez l'ingénieur du son, à la vôtre ! Je préfère m'en prendre au groupe.

Vous le savez, nous avons adoré "This is happening" et c'est donc en tant que gros gros fanatique de James Murphy que je vais vous dire deux mots à son sujet. Dans la chronique de l'album, nous défendions l'attitude omnivore de Murphy face à ses ainés (Bowie, Velvet Underground, Iggy, Numan) à qui il piquait gimmicks, mélodies, idées et poses, sans vergogne certes, mais selon nous dans une logique "pop" où l'influence et la ré-interprétation sont des principes fondamentaux. Jusque là, tout va bien, et on a droit à de nouveaux tubes qui rappellent les anciens. J'ajoute que James Murphy est un type que l'on aime bien : avec sa perpétuelle barbe de douze jours, ses cheveux grisonnants et sa bedaine de bon homme, il nous "ressemble", c'est un type comme nous, pas une star, qui chante les chansons qu'on aime et l'on se sent permis de rêver à un destin similaire. Sauf qu'à force d'ingurgiter tout ce qui lui passe sous les yeux, Murphy en est venu à aller trop vite et à dévorer non plus les airs de ses idoles mais leurs attitudes et c'est ainsi que l'on se retrouve au Zénith de Paris, ce soir-là, avec l'impression de voir jouer une superstar : ça n'est pas un concert, c'est un show.


(I can change, telle qu'elle est jouée sur le disque live "London Sessions")

Le groupe est dans la démonstration de force, ce que je ne lui reproche pas d'ailleurs, et joue beaucoup de chansons du premier album (des hymnes remuants tels que Daft Punk, Tribulations ou On repeat, donc) qui fonctionnent à merveille sur le public du Zénith même si de mon côté, je m'interroge. Dès lors que le groupe s'attaque à quelque chose d'un peu plus "profond", l'eau ne prend pas. All my friends, par exemple, jouée trop vite, trop fort, n'était qu'une bouillie sans la moindre once de sentiment (ils n'ont même pas essayé de lancer New York I love you but you're bringing me down, c'eût été un massacre) alors qu'elle est le symbole du talent de Murphy pour cristalliser les émotions des jeunes gens de sa génération (elle amène aisément aux frissons, voire aux larmes, selon comment et quand vous la passez). I can change, la meilleure chanson de "This is Happening" est elle ralentie et l'on se demande presque si ça n'est pas fait exprès pour coller à un jeu d'éclairage (ridicule) scénique consistant à suivre la mélodie synthétique, espérons que ça ne soit pas ça et prions pour un simple "choix malheureux". La question sur toutes les lèvres cette nuit-là (enfin surtout sur les miennes, je causais tout seul) : pourquoi sept ? Pourquoi toujours plus ? Quatre ou cinq musiciens auraient largement suffi au bon déroulement du concert et ce nombre réduit aurait sans doute permis d'entendre la musique (et pas seulement l'atroce mix ambiant de "batterie/bouillie sonore" qui domina la soirée une fois la première piste terminée - Dance yourself clean, plutôt réussie). Je veux bien que Murphy ait promis à tous ses copains de visiter l'Europe avec lui, mais il aurait pu leur demander de regarder depuis les coulisses au lieu de les inviter à bousiller son concert. Pourquoi sept musiciens quand on ne sait que la grande majorité des ingés sons live ne sait pas mixer le son de quatre ? Même une tuerie comme Daft Punk is playing at my house, qui normalement se joue les yeux fermés et finger in the nose, parasitée par de nouveaux sons électroniques joyeusement poussés dans les retranchements extrêmes du volume, même celle-là était poussive. Mais c'est ma faute aussi, j'en veux toujours trop, je sais. Demander à des musiciens de faire entendre leur musique, de l'interpréter, et à des ingés sons de délivrer le son d'un concert de son donjon de boucan, c'est trop. Mea culpa.

The return of the Big White Dude, throwing darts in clubbers' hearts

Ce concert de LCD Soundsystem n'était pas à vomir, loin de là, je ne dis pas ça, mais je ne me contente plus de ce genre de show huilé, usiné pour faire danser les foules, au mépris de la musique et du sentiment. Ce genre de défouloir ne vaut pas mieux qu'un bon porno et laissez-moi vous dire qu'imaginer James Murphy à oilpé ne me refile pas la gaule. (*)


Joe Gonzalez


P.S. : Un disque live est sorti il y a peu sous le nom "London Sessions" qui documente pas trop mal ce que je raconte ici (absence de sentiment, I can change ralentie, et James Murphy qui se prend pour un crooner) sans bien sûr le volume-gadoue inhérent à un concert dans des conditions réelles (ces sessions sont enregistrées en studio). Je vous le déconseille cela dit, si vous aimez le groupe.




(*) : Nancy Whang, à la limite...

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