C'est entendu.

jeudi 29 avril 2010

[Vise un peu] Directorsound - The Day Of The Dance

Allez, on va ailleurs aujourd'hui. On quitte la ville, les voitures, on quitte la France, on quitte tout. On va dans une espèce de village imaginaire, au milieu de rien, perdu dans une Europe quelque peu rêvée, dans un village rural et isolé où le temps semble avoir décidé de tourner au ralenti, brouillant les cartes, mélangeant les codes du Moyen-Age et ceux de notre époque. Celui qui vous y amène, sous le nom Directorsound, c'est Nick Palmer, un trentenaire anglais venu du Dorset qui avait décidé d'enregistrer sa musique après être tombé malade en 2002 et ne s'est pas arrêté depuis.

Aujourd'hui au village, c'est un jour de fête, la petite fanfare est là, elle a bien répété, et l'on se prépare avec entrain à danser sur des rythmes de valses au son des accordéons. Il y aura une marche en fin d'après-midi qui déambulera dans les quelques grand' rues animées, et cette ambiance de joie ira se prolonger jusqu'aux premières heures de la nuit, avant que tout le monde ne rentre chez soi et n'aille se coucher. Et si vous ne pouvez pas être là, ce n'est pas grave, parce que l'album "The Day Of The Dance" de Directorsound, sorti l'année dernière, semble être la mise en musique de ce lieu, de cette journée avec son atmosphère particulière, depuis l'aurore symbolisée par la clarté délicate d'une autoharpe caressée et de bruits de portes qui grincent doucement, jusqu'à la nuit mélancolique bercée par des arpèges de guitare sèche.


(Ciderblind)

Dans ce petit voyage instrumental hors du temps, où les influences venues d'Europe de l'Est (mais pas seulement) se joignent au minimalisme presque enfantin des boites à musique qui parsèment certains morceaux, Directorsound crée l'illusion d'un ailleurs en jouant une musique instrumentale typiquement folklorique et rurale, mais issue d'un lieu imaginaire, et se base sur des topos du genre pour créer un album attendrissant et doucement nostalgique. Un ailleurs perdu et innocent, raconté en 35 petites minutes. Toute une parade d'instruments semble avoir été réunie pour l'occasion. Beaucoup d'accordéons certes, mais aussi des tas de percussions (parfois non-identifiables), des vibraphones, quelques instruments à vent, un peu de piano et de guitare, même de la scie musicale par moments, autant d'occasions de jouer sur une certaine gaucherie des compositions, plus riches qu'elles n'en ont l'air, allant jusqu'à se révéler être de petites fresques narratives de sept minutes. C'est la grande richesse des ambiances qui fait la force de "The Day Of The Dance." On passe aisément de berceuses lentes, dépouillées et poétiques à des marches loufoques jouées par des orchestres amateurs, les instrumentations typiquement folk se chargeant de lier le tout dans une belle homogénéité. Sur certains morceaux comme At the dance, c'est une véritable ambiance de fête dansante venue du passé qui est recrée avec des rythmes appuyés maladroitement et des petites mélodies sautillantes jouées parfois un peu en dehors du rythme. Et si cette manière de se lier à une musique traditionnelle de manière moderne pourra évoquer à certains le travail de Beirut (vous souvenez-vous encore d'eux ?), Directorsound semble beaucoup plus honnête, naturel, presque brut, avec un enregistrement sans fioritures allant jusqu'au bout du voyage qu'il crée avec presque rien, et avec un charme absolu. Et quand retentit une dernière fois dans l'avant-dernier morceau After The March cette rythmique-leitmotiv qui a parcouru tout l'album, ce ternaire lent et humble, c'est presque à regret que l'on sent venir l'inéluctable fin de cette belle promenade.


(After The March)

Avec son ambiance attachante venue de nulle part et ses instrumentations délicates, "The Day of the Dance" est donc un petit album précieux et généreux, rempli d'une infinie tendresse qui met inévitablement un sourire sur le visage de l'auditeur, et que l'on a envie de réécouter comme on retourne parfois en rêve dans les lieux de notre enfance, embellis par le flou artistique de l'oubli.


Emilien Villeroy.


PS : J'adorerais vous dire d'acheter cet album, mais il n'a été pressé qu'à... 40 exemplaires sur le minuscule label Reverb Worship. Autant vous dire qu'il est un peu tard pour vous le procurer. Je vous laisse donc maîtres de la manière dont vous utilisez les moteurs de recherches au gré de votre curiosité.

9 commentaires:

  1. LIKE!

    (Je me demande comment un album peut être pressé à seulement 40 exemplaires.. je croyais que ça coûtait assez cher et que du coup, il fallait un nombre minimum (500) pour que ce soit possible)

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  2. En fait, c'est sorti sur un petit label (" Reverb Worship") qui fait uniquement des exemplaires limités et à la main des cds qu'il sort, ce qui explique ce nombre de 40. J'avoue que le terme "pressé" dans mon PS était un peu trompeur!

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  3. J'aime bien l'idée, voire les morceaux (peut-être pas au point d'avoir envie de les réécouter me concernant), mais je trouve ça intéressant, original, plutôt bon et plutôt bien.

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  4. Je n'étais qu'à la moitié de "After the march" quand j'ai posté le commentaire ci-dessus. Et je le maintiens mais j'ajoute tout de même que c'est typiquement le genre de zique qui fout le cafard, et en cela ça m'a fait penser à l'infâme Yahn Thiersen d'Amélie Poulain. Uniquement en cela, heureusement. Mais quand même c'est terriblement bourdonneux comme musique, ça fout les foies et le moral au fond des pompes :-/

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  5. existe t-il un barème pour vos notes? à quoi correspond 3.5? qu'est-ce que cela signifie? bon, mauvais, etc?? j'ai trouvé ça nulle part sur votre site, et j'ai pourtant fouillé les différentes rubriques...

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  6. Nous notons de 0 à 5 chez Anonyme ! Un 3,5 correspond ainsi à un 7/10, un 14/20, un 70% :D

    C'est pas mal quoi.

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  7. anonyme : le barème va de 0 jusqu'à 5, par intervalle de 0,5.
    3,5/5 correspond donc à une bonne note, même si nous n'avons pas de signification particulière pour chaque note.

    rémi : ahah, oui, je confirme, c'est le genre de musique qui peut très vite donner le cafard quand on est d'humeur un peu terne.

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  8. Bizarre... Moi quand je ramenais un 14 à la maison, mon père me foutait une branlée, une vraie raclée. Il prenait son ceinturon et ça y allait. Ah il était comme ça mon père... Il me répétait sans arrêt, avant que je parte à l'école, "JE VEUX PAS UNE NOTE EN-DESSOUS DE 15 !". La peur au ventre je répondais "ok ok papa je vais faire mon possible". Et si le soir je rentrais avec une note "minable", comme il disait, une sacrée volée m'attendait et c'était aussi la garantie d'une nuit passée au garage, dans le noir, avec l'interdiction d'aller pioncer dans la bagnole, qu'il fermait à clé. Ce que je faisais alors, pour avoir chaud : je me glissais sous la voiture et, collé aux pneus arrières, j'essayais de me réchauffer... Dieu sait qu'il faisait froid dans ce maudit garage... Une fois il m'a tellement savaté la gueule que j'ai plus rien vu pendant 5 mois, le temps que mon hématome autour de l'œil se résorbe. C'était pour un 14 et demi en plus. Oh je m'en souviens comme si c'était hier... Je répétais toujours "à 0.5 point près, à 0.5 point près" à qui me demandait ce qui m'était arrivé.

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