C'est entendu.

jeudi 8 septembre 2011

[Vise un peu] Shugo Tokumaru - Port Entropy + une bien bonne soirée nippone !

Shugo est un phénomène scientifique avant d'être un musicien et songwriter japonais. Je ne dis pas ça parce qu'il est né sur le site Ground Zero de Nagasaki ou parce qu'il a trois testicules. Si je le qualifie de phénomène scientifique c'est parce qu'il prouve par 9 le théorème selon lequel "à esprit sain, corps sain" ou pour être plus précis dans son cas : "à esprit jeune, corps jeune".

Cette équation, je l'avoue, j'y crois dur comme fer, m'employant moi-même depuis des années à la démontrer avec mes moyens, et notamment en bouffant des Pepito Croustichoc matin midi et soir : tout le monde me donne cinq ans de moins que je n'ai vraiment. Le côté négatif c'est que je mesure aussi cinquante centimètres de moins que la taille normale d'un type de mon âge, ce qui fait que je suis tout petit. Concernant le gain d'années de Shugo, ce serait plutôt quinze. Un peu à la manière de Smaïn, qui n'a jamais pris une ride, le bonhomme trimballe ses 31 ans comme s'il venait d'entrer en seconde et il n'a besoin d'aucun artifice, c'est naturel : quand on est jeune dans sa tête, quand on se comporte naturellement comme un adolescent, le corps n'a d'autre choix que de s'adapter.

(Shugo, 15 ans, lors d'un voyage scolaire au zoo)

Du coup rien de plus naturel pour lui que d'utiliser des instruments de bac à sable : tambourin et claveçin sont à l'honneur dans les meilleures compos de Shugo. En l'écoutant on a tendance à complètement oublier le 6 août 1945 ou Fukushima, on laisse tous ces problèmes de côté, on oublie même ses propres malheurs, on se vide la tronche un bon coup. Table rase pour un nouveau départ en toboggan. C'est sans doute pour oublier la radioactivité qui maintient son organisme à l'âge pré-pubère et pour tirer un trait sur les soucis écologiques de son pays que Shugo opte pour des sonorités occidentales à des lieues du groupe de The Dö et bien éloignées du jeu de Go ou du théâtre de No. Finis les sushis, les makis, le wukami, les tamagotchis ou les tsunamis. Churro Tokumaru en a assez du pays du soleil levant, il préfère se coucher là. C'est d'ailleurs ce qu'il avait dit, un jour d'Avril 2011 au Divan du Monde, entre deux chansons, en substance. Avec à peu près autant de mots mais beaucoup moins de vulgarité que ma retranscription mémorielle ne me le suggère : "There's some shit goin' on back home but, hey, I'm here sooooo..." Il est vrai qu'entouré d'un groupe aussi mignon (mais attention, pas cucul la praline non plus, pas "kawaï" comme on dit, j'entends simplement par là que l'harmonie du groupe et les grimaces du batteur étaient attendrissants), pieds nus sur son tabouret de bar, Shugo nous avait rassasiés d'une dose de mélodies nécessaire, d'arrangements malins et de quelques sourires charmeurs.



(Malerina)


Le plus dingue c'est que même la discographie de Shugo semble touchée par le phénomène de rajeunissement évoqué plus haut. Dernier exemple en date, l'album "Port Entropy" (son cinquième me semble-t-il), qui a d'abord paru au Japon en Avril 2010 (il était disponible depuis des mois sur l'internet illégal) avant d'être édité en Europe en Février 2011, ce qui fait qu'à chacune de ses apparitions, on avait l'impression qu'il "venait de paraitre" alors que les chansons ont dû être enregistrées en 2009 et qu'elles ont commencé à circuler cette année-là. Un éternel renouveau, à la manière de la voix câline et enjôleuse de Shugo qui évidemment n'est ni affublé d'une gravité gutturale empreinte de goudron ni n'est-il doté d'une quelconque mue pubère. Tel un enfant de chœur, il a le don de créer une musique que l'on croirait imaginée par des enfants mais que l'on sait irréalisable par eux (un enfant, c'est soit trop bordélique, soit trop au ras du sol, soit c'est Mozart, ou alors c'est les Poppys mais je préfère éviter le sujet).



(Rum Hee)


On pourrait croire à un effet digital de bas étage comme nous y ont habitué des artistes pratiquant l'autotune ou l'ancienne joueuse de tennis brésilienne nommée Kuerten et récemment reconvertie en chanteuse extravagante après un changement de sexe : Lady Guga, mais c'est aussi grâce à sa mutation infantile que Shugo obtient ce son si spécial, cette voix lointaine et angélique.


(Shugo cherche un remède à son affliction, parce qu'il aimerait bien avoir un jour du poil aux pattes)


Du même acabit que son prédécesseur, le déjà très bon "Exit", cet album de musique pop arrangé avec talent, empreint de culture tropicalia, chanté en anglais et en japonais sans prépondérance, est une nouvelle réussite à mettre au compteur de la jeunesse nippone, quel que soit l'âge indiqué sur ses papiers. On y trouve une candeur et une douceur que les adultes d'aujourd'hui auraient bien du mal à contrefaire ou imiter.



Joe Gonzalez
(avec la quantifiable assistance de Rémi, du blog cinéma Il a osé)

3 commentaires:

  1. il a osé !!!!!!!!!!!!!!!!!

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  2. Sacré papelard sur cet UFO de la musique pour enfants japonaise :D

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  3. J'arrive pas à quantifier l'assistance de Rémi de Il a osé.

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