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L'une des œuvres majeures de Troum, la trilogie "
Tjukurrpa" (le nom se réfère au concept aborigène du "Temps du Rêve", à la fois espace et temps qui précède l'apparition du monde matériel, qui transcende celui-ci et auquel on peut toujours accéder — une idée difficile à résumer mais particulièrement intéressante, qui dépasse largement nos définitions du "rêve"), consiste en trois albums de musique
ambient lo-fi remplie d'effets, proposant peu de passages mémorables en surface (à part sur le troisième disque) mais possédant pourtant cette qualité hypnagogique que le duo recherche, évocatrice tout en restant abstraite, des "paysages oniriques organiques et archaïques" (selon les propres mots du duo) qui ne manquent pas de vous toucher lorsque vous vous y abandonnez.
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C'est une toute autre affaire, cependant, que je vous propose d'écouter aujourd'hui. "Eald-Ge-Stréon" (qui signifie "trésor ancien" en vieil anglais) est un disque composé de vieilles faces B et raretés remaniées, et la différence avec les sons un peu en retrait de "Tjukurrpa" frappe immédiatement : les pistes sont ici rayonnantes, parfois violentes, empreintes de majesté ou de panique, virant parfois presque au
noise et avec des percussions d'une vivacité étonnante. La première piste,
Elation, est quelque chose d'à la fois massif et quasi-céleste : des nappes de guitares au son abrasif soutiennent de superbes harmonies lentes et sûres avec un effet quasi-orchestral.
Usque Sumus Lux, la meilleure piste de l'album, va encore plus loin dans ces contrastes (imposant et aérien, atmosphérique et violent, harmonique et bruitiste), en démarrant avec un rythme mi-industriel mi-tribal sur des cloches, rythme qui grandit, passe à travers une nappe harmonique plus sombre, puis plus abrasive, menant lentement mais sûrement à une déflagration sous la forme d'une mélodie à la guitare ultra-saturée qui prend des allures de musique sacrée (pour peu que vous écoutiez l'album à volume suffisant, la puissance de ce morceau est écrasante). La suite de l'album alterne avec bonheur entre sons plus "intérieurs", organiques (sur
Eolet), rythmes particulièrement prenants (sur
Ecstatic Forlorness), ambiance plus mélancolique (
Dhânu-H), avant de franchir les frontières des genres sur
Procession, reprise du groupe de post-punk
Savage Republic (écoutez l'originale
ici et la version de Troum ci-dessous) et de finir sur le tour d'horizon
Crescere.
Si je vous ai convaincus, un dernier conseil : essayez de trouver l'édition limitée en double CD de l'album, que l'on peut encore trouver chez certains vendeurs et qui comporte en bonus une piste inédite de 33 minutes intitulée Abhijñâ — addition plus que bienvenue à un disque qu'il serait dommage de laisser passer.
— lamuya-zimina
J'adore le fait que rien qu'en lisant le titre de l'article, je SAIS que c'est un article de Lamuya !
RépondreSupprimerToujours au taquet, Lamu !
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