Sur son premier album, Merril Garbus, une californienne moustachue à la puissante voix masculine (africaine), avait laissé entendre qu'elle pouvait tout dégommer sur son passage. Ses chansons à vocation pop (refrains, mélodies et tout le tintouin) étaient (bri)colées dans tous les sens et tenaient avec des bouts de ficelles. On pensait à Micachu pour le DIY ingénieux et à Talking Heads pour la bonne idée de traverser l'Atlantique vers l'Afrique et ses rythmes dansants.
Deux ans plus tard, la piste suivie par tUnE-yArDs est la même, sauf que Merril a progressé et que ses chansons sont bien plus réussies et marquantes.
(My country, une façon réactualisée de chanter l'Amérique)
Démarrant par un heureux détournement du traditionnel air patriotique américain My country 'tis of thee, ce second essai se veut aussi bien travaillé du point de vue des idées que de son étrangeté musicale. Merril chante son désenchantement vis à vis du rêve américain avec autant d'enthousiasme et d'apparente bonne humeur que Kathleen Hannah pouvait en déployer lorsqu'elle criait la cause des femmes battues avec Le Tigre :
My country, 'tis of thee
Sweet land of liberty
How come I cannot see my future within your arms
[...]
The worst thing about living a lie
Is just wondering when they'll find out
Sweet land of liberty
How come I cannot see my future within your arms
[...]
The worst thing about living a lie
Is just wondering when they'll find out
Sa voix, régulièrement utilisée comme celle d'un jeune africain zélé, peut aussi se révéler très féminine, voire carrément jazzy (You yes you) mais quoi qu'il arrive, c'est il faut bien le dire son principal atout. Personne n'a cette voix. Ou en tout cas personne ne l'utilise comme ça. Ça n'est pas quelque chose que l'on peut dire d'un nombre incalculable de chanteuses (il y en a tout de même quelques unes qui sortent de l'ordinaire avec excellence : St Vincent, Kim Deal, etc) et cet avantage joue clairement en sa faveur. Son timbre particulier offre une originalité supplémentaire à des chansons qui n'en avaient même pas besoin. Et c'est là que la bât blesse : la voix de Merril est très particulière, son chant rapide faisant glisser les mots comme sur des rapides et ses mélodies mêlant pop contemporaine et motifs africains, ne nous le cachons pas, voilà de quoi traumatiser plus d'un auditeur aux oreilles sensibles. Ajoutez à cela un look hors du commun (visage peinturluré, coupe de cheveux de fraggle, fringues passées de mode et grimaces de la quatrième dimension lorsqu'elle chante et Merril ne fera évidemment pas l'unanimité.
(Bizness)
Je vous avoue même volontiers ne pas être client de tout son univers. Certaines de ses chansons me laissent en effet complètement froid. Pourtant, je ne peux m'empêcher de louer cette artiste et son univers, ne serait-ce que parce qu'elle en a un, et pas un univers en papier-mâché, miiiignon ou monté de toutes pièces, non, un Monde musical et visuel à part, le sien, bâti de ses mains, en dehors de toutes les cases où l'on aurait pu aimer la ranger (et CERTAINEMENT PAS à côté de Vampire Weekend ou autres pompeurs d'âmes africaines). Je comprends facilement que l'on n'accroche pas à ce personnage et à sa musique, rien de plus naturel que d'être dérouté ou tout simplement pas conquis, mais critiquer une artiste inoffensive, en devenir qui plus est - je me permets de croire que j'aimerais encore plus de chansons sur son prochain disque ! - qui ne se contente pas du peu dont tant d'autres font leur petit déj', je ne le conçois pas.
C'est certain, si vous n'avez même pas succombé au charme du très beau clip de Bizness, le véritable tube de l'album, vous aurez bien du mal à accrocher aux quelques autres très belles trouvailles énergisantes qui ornent ce disque, mais si vous arrivez à passer outre les grimaces, les tics et les bijoux un peu ringards de cette punkette à forte personnalité, vous devriez trouver-là une partie de la bande-son de vos road-trips estivaux.
Joe Gonzalez
J'aimais bien le précédent, mais malgré toute la sympathie que j'ai pour cette nana, je me suis un peu lassé de ses cris.
RépondreSupprimerEn revanche elle est à voir en concert.
Qu'est ce que tu veux dire par "inoffensive" ? Qu'elle n'inspire pas le rejet naturel qu'on a devant ceux qui font la hype ?
RépondreSupprimerExactement. Et surtout qu'elle n'offense pas la Musique avec un grand M. Qu'elle ne lui fait pas de mal. Elle va de l'avant et c'est BIEN.
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