C'est entendu.

lundi 30 mai 2011

[Vise un peu] Barbara Panther — Barbara Panther

Vous vous rappelez, au milieu des années 90, quand plusieurs artistes qui occupaient le devant de la scène assemblaient avec bonheur trois, quatre ou cinq genres connus (pop, hip-hop, trip-hop, house, folk…) sans avoir l'air de les recycler, et créaient des albums réjouissants dont plusieurs sont toujours des références aujourd'hui ? "Odelay", "Post" (ou "Homogenic" si vous préférez), "10,000 Hz Legend" — et en cherchant un peu plus loin, les premiers albums de Cornelius et Moloko ? Bien sûr, on trouve toujours de nouvelles possibilités, des mélanges réussis et du renouveau aujourd'hui (là n'est pas la question), mais à l'époque — j'en étais encore au tout début de mes découvertes musicales —, tout ça m'émerveillait.

Et si je vous parle de cette période-là, ça n'est pas parce que le premier album de Barbara Panther est rétro (il en est loin), mais parce qu'il semble vouloir se réapproprier ce terrain, ce cocktail multigenres plein de couleurs dans la confection duquel brillaient ces artistes à l'époque. La musique de Panther, entre pop, musiques électroniques, hip-hop, soul…, va un peu dans tous les sens avec énergie et enthousiasme — et pour une fois, je crois qu'on peut oser la comparaison à Björk au niveau du style (sans vouloir mettre dans un même panier toutes les artistes qui font des chansons pop avec des sons un peu inhabituels). Si les deux chanteuses ont des personnalités différentes, elles ont des manières similaires de les affirmer, une belle extravagance revendiquée dans les idées comme dans les réalisations ; Panther est d'ailleurs aidée de ce côté-là par Matthew Herbert, producteur de renom (et musicien lui-même) qui a travaillé avec… ben tiens, Björk, Moloko, Yoko Ono, Cornelius etc, justement.


(Empire)

Pour autant, ce bouillonnement d'idées et d'énergie ne garantit pas forcément un album réussi. De nombreuses pistes sur "Barbara Panther" montent ensemble des éléments compatibles et d'autres qui fonctionnent moins les uns avec les autres ; l'exemple le plus frappant est Dizzy, qui démarre de façon très prometteuse avec une instrumentation intrigante et plutôt sombre (belle utilisation de samples d'abeilles), sur laquelle le chant de Barbara (l'un des points forts du disque) prend un groove léger mais prenant… puis fait un virage à 180° et fonce dans le mur gluant d'un refrain sucré jusqu'à l'écœurement, qui s'étire à n'en plus finir (la piste est fichue après ça). Un contraste un brin similaire mais nettement plus réussi se présente sur Unchained, heureusement plus haut sur le disque…


C'est peut-être le fait que je n'écoute plus beaucoup de pop aujourd'hui qui fait qu'une partie du disque me laisse sur ma faim ou tombe un peu à côté de la plaque pour moi (malgré ses réelles qualités). Mais l'album comporte au moins deux très belles réussites : Empire avec son atmosphère si particulière (nerveuse, presque inquiétante et pourtant si entraînante), et la très remontée Rise Up (qui vous crispera en un temps record avec son beatboxing si vous n'êtes pas dans l'humeur, mais qui a vraiment de quoi étonner et réjouir avec ses multiples voix aux effets tous différents et sa mélodie accrocheuse).


(Moonlightpeople)

Au final, "Barbara Panther" est un album prometteur mais inégal : pas mal de faux pas et de demi-réussites, une certaine naïveté aussi, mais un beau potentiel et quelques moments mémorables. Un disque qu'on recommandera sans hésitation aux fans du genre (des genres ?), même s'il aura un peu plus de peine à convaincre les autres…


— lamuya-zimina

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