[They Live] Midlake au Bataclan

Le 20 avril 2010, Midlake était de passage à Paris, l'occasion pour moi d'aller voir un groupe dont la musique m’intrigue depuis quelques temps. Ces texans se sont fait connaître en 2006 grâce à leur deuxième album "The Trials of Van Occupanther" qui avait enchanté la critique. Et c’est seulement en ce début d’année après 4 ans de maturation au fin fond des forêts elfiques qu’est sorti "The Courage of Others," un album qui ravira les amateurs de folk anglaise et assommera les autres.

Avant tout je tenais a saluer la première partie assurée par Cascadeur, prix CQFD des Inrocks en 2008. L’artiste arrive sur une bande-son de conquêtes spatiales, en toute sobriété : peignoir de catcheur et casque de pilote de chasse, une voix entre Robert Wyatt et Thom Yorke, des mélodies simples mais des arrangements électroniques soignés. Ses chansons subtiles et son personnage touchant, malgré des introductions parfois un peu maladroites, nous ont gâtés d'une première partie en douceur. Bref une belle découverte et un nom à ne pas oublier.

Et puis Midlake entre en scène, sept musiciens, une batterie, une basse, une flûte, quatre guitares et cinq barbes. La machine se met en route sur Winter Dies, issu du dernier album et la maîtrise est parfaite, chaque instrument à sa place. Dès ce morceau, tout est clair, les fans de pop indépendante ne seront pas à leur aise et les amateurs de la folk post-apocalyptique du dernier album passeront une soirée presque aussi bonne que celles passées à lire Nietzsche ou Baudelaire en runique dans le texte au fond d’une grotte retirée d’une montagne nordique. Tout y est, le chant lancinant et une harmonie parfaite entre les voix, les guitares tranchantes, la flûte planante et une section rythmique puissante mais discrète.

(Head Home, jouée au Nouveau Casino, pour vous donner une idée)

Après une brève présentation ponctuée d’un « We are Coldplay from England !» l’atmosphère se détendit suffisamment pour laisser place à des chansons (un peu) plus légères. C’est donc avec un Van Occupanther (en écoute sur votre gauche) extrait de l’album de 2006 qu’enchaîne le groupe. On était prévenu, le morceau sonne très Coldplay, mais avec l’émotion en plus. Le reste du show est un cocktail tiré de "The Courage of Others" entrecoupé de chansons plus anciennes. Le groupe monte en puissance et dégage un peu plus d’intensité avec chaque titre jusqu'à Core of Nature, mon morceau préféré sur "The Courage of Others," où tout explose, les voix sont alors un écho de solitude et de damnation et le solo de guitare final à la wah sonne comme le Jugement Dernier.

Et puis on arrive déjà au rappel, pour lequel le groupe joue le titre qui les a menés au succès : Roscoe extrait de "The Trials of Van Occupanther," un morceau pop sympathique, mais qui n’était pas tout à fait en cohérence avec l’ode au désespoir exhortée cette soirée-là.

Midlake est un groupe de musiciens tous issus de la Texas's Jazz School et ça se ressent, tout comme le fait que la majorité de ces gaillards soient barbus. Là où Jethro Tull avait exploré des forêts joyeuses aux lutins farceurs, Midlake a visité un bois sombre et mélancolique, déserté de toute créature vivante. En conclusion, si vous êtes prêts pour une heure trente d’accords mineurs et de chansons désespérées magistralement exécutées, allez voir Midlake. Sinon, passez votre chemin et essayez Sum41.

Thomas Lebegue