[Comptez pas sur moi] Yeasayer - Odd Blood

Il est des disques dont on peut dire qu'ils sont symptomatiques d'une tendance. Ils en portent certains germes, et l'on peut sentir la tempête arriver derrière le relatif calme qu'ils trimballent. Le second album de Yeasayer n'est pas de ceux-là. Les résultats sanguins du groupe ne sont pas seulement "étranges," ils sont tout bonnement catastrophiques. Contaminé jusqu'au dernier atome, "Odd Blood" n'est pas un simple symptôme, il est une phase avancée de la maladie.

Les petits gars de Yeasayer n'en sont qu'à leur second album et ils ont déjà pris au mot le mouvement hédoniste post-hippie et BCBG formé par Animal Collective, Vampire Weekend, MGMT et toutes ces belles gueules pouponnes qui s'habillent cher et qui passent bien à la téloche. Pour être "in" il faut des clips psychédéliques mettant en scène des gens nus, de l'électronica flirtant avec R&B et musiques africaines, et, apparemment, la touche Yeasayer réside dans la laideur infinie de leurs pochettes de disques.

Ambling Alp
(écoutez aussi ONE dans le player sur votre gauche)

Tout cela ne vous effraiera pas si vous fricotez depuis longtemps avec les groupes de mauvais gout communément admis (The Mars Volta...) et avec le prog rock décadent qui depuis les années 70 est allé de mal en pis, ou plus généralement si vous raffolez des premiers de la classe précédemment cités, et alors vous pourrez allègrement vous enquiller sans broncher l'intégralité de "Odd Blood" et vous crierez au génie devant un groupe qui sait si bien mêler les genres, produire d'impeccables tubes pop (Ambling Alp), structurer ses chansons comme des montagnes russes (ONE) ou pousser le psychédélisme d'antan dans les orties en y injectant une féroce dose d'énergie dancefloor (Mondegreen) digne de Hot Chip ou des cousins Delorean. Maaaaaalheureusement, l'auteur de ces lignes ne peut partager votre enthousiasme et se doit de ne pas y aller avec le dos de la cuiller lorsqu'il s'agit de juger l'un des pires enregistrements qu'il lui ait été donné d'entendre depuis oooouh au moins six mois.

N'en déplaise au progrès, à la modernité et à la pop psychédélico-branchée en général, "Odd Blood," qui n'est pas un mauvais disque par manque d'idée, ni par manque de savoir-faire, pêche par une vulgarité exacerbée et son potentiel d'expérimentation se voit sabordé par une enveloppe repoussante. Comme dirait Internet, c'est un "EPIC FAIL."

Joe