C'est entendu.

samedi 16 juillet 2011

Swing Spleen #-3

par Bertrand Bruche
art par Jarvis Glasses


Mike Stern et la bimusicalité


Toujours le cul entre deux chaises musicales, Mike Stern se trimballe le phrasé de Miles Davis, la guitare d'Andy Summer et la gueule de Mick Jagger. Sa sonorité, par contre, est unique et travaillée, juste résultat d'une technique irréprochable et d'un imbroglio électronique dont lui seul détient le secret. Unifiant ainsi jazz et rock, l’œuvre de Stern balance entre ballades et grooves endiablés.

Après avoir sué sang et eau au Berklee College of Music, âgé d'à peine 22 ans, Stern intègre le groupe américain Blood Sweat and Tears. Il y fera ses armes et y gagnera en notoriété. Très vite recruté par Miles Davis, il se met au service du patron pendant près de trois ans. A grands coups de disto, il apporte alors beaucoup au sextet de Miles lors de l'enregistrement live de "We Want Miles", en 1981. Ainsi, sur Jean Pierre, par exemple, il n'hésite pas à entamer son improvisation avec un son qui n'a rien à envier à la disto de Jimmy Page. Ainsi parvient-il à donner du relief à un standard souvent lent et répétitif.

(Miles Davis - Jean Pierre)

Stern accompagnera ensuite le quintet de Michael et Randy Brecker, joue dans Word of Mouth, le Big Band de Jaco Pastorius et monte bon nombre de projets personnels à côté. Là encore, il s'entoure des plus grands. Son œuvre est plutôt cohérente et bien que certains albums soient plutôt axés ballades ("Voices" par exemple) ou rock (son petit dernier: "Big Neighbourhood"), la recette est toujours plus ou moins la même. Qu'importe ! Elle fonctionne, donne des frissons et Dieu qu'elle est efficace ! La structure des morceaux est généralement classique : un thème, une longue séquence d'improvisations et la reprise du thème. Sans jamais hésiter à enclencher la disto, à prolonger des bends pendant un ou deux temps, sans pour autant se passer des gammes et des accords abracadabrants marqués au fer rouge par le sceau du jazz.


(Play)

Le meilleur exemple du jeu de Mike Stern apparait pour moi dans la prestation live de Original Rays, aux côtés de Michael Brecker, au Newport jazz festival. Outre l'introduction que Brecker joue sur un EWI (un instrument à vent électronique contrôlé par un synthétiseur), l'improvisation de Stern est impressionnante. Le relief qu'il apporte au morceau est particulièrement criant. Ses premières notes sont calmes et délicates, avant que toute son improvisation ne gagne en volume et en intensité. A se demander quand et comment il pourra s'arrêter : sans crier gare et magistralement, voilà comment.


(Original Rays)

Bimusical par excellence, incapable de choisir entre deux genres, Stern est capable de convaincre les partisans des deux bords. Amateurs de jazz, cœurs de rockeurs, tendez l'oreille, ça vaut le détour !

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